Les 20 locomotives bimode commandées à Bombardier pour équiper le réseau de trains de banlieue de la métropole à partir de 2010 pourraient coûter jusqu'à 72 millions de plus que le prix annoncé en août par l'Agence métropolitaine de transport (AMT).

La Presse a appris que le coût total de ces 20 locomotives neuves pourrait s'élever à 308,8 millions, soit 30% de plus que les 236,3 millions annoncés en août dernier. Cette somme comprend les provisions pour le taux de change, un budget pour les imprévus, des droits de douane ainsi que des pièces de rechange pour les locomotives neuves.

C'est d'ailleurs ce budget, frais de projet inclus, qui figure dans le dernier programme triennal d'immobilisations 2009-2011 de l'agence, et qui a fait l'objet d'une autorisation de dépenses de 288,6 millions signée par la ministre des Transports du Québec, Julie Boulet. (NDLR: Les dépenses autorisées par Québec excluent les frais de financement et les variations du taux de change.)

Selon les données que l'agence a fournies à La Presse, ces frais se divisent globalement en trois catégories. Le budget total du projet d'acquisition des locomotives, négocié en dollars américains, prévoit ainsi une réserve de 8% pour couvrir les variations du taux de change. La valeur de la réserve s'établit à près de 21 millions de dollars.

Le coût total du projet inclut également un budget de contingence de 10% sur le coût des locomotives et des pièces de rechange, soit près de 24 millions.

Des droits de douane de près de 24,5 millions (23,095 millions US), soit plus d'un million de dollars par locomotive, s'ajoutent aux frais qui n'ont fait l'objet d'aucune mention lors de l'annonce du contrat attribué à Bombardier, le 18 août dernier.

La différence de 72,5 millions entre le budget total et celui qui a été annoncé le 18 août dernier comprend également 2,46 millions en pièces de rechange, plus d'autres frais (financement, surveillance) qui n'ont pas été précisés.

Un contrat «américain»

L'acquisition de ces 20 locomotives, dont cinq sont réservées à la ligne Mascouche-Repentigny-Montréal, fait suite à une entente conclue en 2007 entre l'AMT et le transporteur américain New Jersey Transit (NJT).

À l'origine, l'AMT devait acheter cinq locomotives neuves et prendre des options sur 15 autres, tandis que NJT cherchait un constructeur pour une commande ferme de 26 locomotives pouvant fonctionner à la fois aux carburants diesel ou à l'électricité.

Le choix du constructeur, la conception et l'ingénierie des locomotives de même que les négociations entre les transporteurs et le constructeur ont été pris en charge, pour l'essentiel, par NJT. Les contrats ont été négociés en dollars américains, et les locomotives seront livrées aux États-Unis.

C'est ce qui explique la réserve pour le taux de change et les droits de douane de 23 millions de dollars américains.

En juillet dernier, NJT a annoncé la conclusion d'une entente pour l'achat de 26 locomotives neuves à un coût «approximatif» de 310 millions de dollars américains. Selon un communiqué diffusé le 9 juillet par NJT, ce coût inclut «la conception, l'ingénierie, la fabrication, la formation du personnel et les pièces de rechange».

Cinq semaines plus tard, le 18 août dernier, l'AMT a annoncé à son tour la conclusion d'une entente avec Bombardier pour la construction de 20 locomotives semblables, à quelques éléments près, à celles du New Jersey. L'AMT a alors précisé qu'il s'agissait «d'un investissement total de 236,3 millions (223 millions US), dont 75% sont financés par le ministère des Transports du Québec (MTQ), et 25% par l'AMT.»

Le même jour, le MTQ a annoncé par communiqué «un investissement de 236,3 millions (223 millions US) pour l'acquisition de 20 locomotives bimode qui seront produites par Bombardier».

Ni l'un ni l'autre de ces communiqués ne faisait mention des autres coûts, bien qu'ils aient été prévus, budgétés et pris en compte dans les dépenses préautorisées par la ministre des Transports du Québec, Julie Boulet, dans le cadre du contrat.

Pas nécessaire d'en faire état

Vendredi, des porte-parole du MTQ et de l'AMT ont déclaré que les coûts annoncés le 18 août ne couvraient que le prix de la commande passée à Bombardier.

Quant aux frais de projet, qui représentent jusqu'à 72,5 millions de plus, la vice-présidente aux communications de l'AMT, Mme Marie Gendron, a affirmé vendredi qu'on n'a pas jugé nécessaire d'en faire état puisqu'il est impossible de prévoir, à cette étape du projet, quelle portion de ces réserves sera vraiment utilisée.

Ainsi, explique Mme Gendron, les quelque 21 millions prévus pour parer à d'éventuelles variations du taux de change ne seront utilisés que si le dollar canadien connaît une dépréciation importante d'ici à la livraison des locomotives.

Le budget de contingences doit quant à lui couvrir des coûts qui n'étaient pas prévus à la signature du contrat et qui sont, par leur nature, impossibles à déterminer d'avance.

Enfin, Mme Gendron a affirmé que l'AMT est en pourparlers pour être exemptée des droits de douane de 23,1 millions de dollars américains. La vice-présidente n'a pas expliqué avec qui ces négociations étaient en cours ni quels arguments l'Agence a l'intention d'invoquer pour être libérée de cette obligation.