Une trentaine d'entreprises à but non lucratif qui font des travaux ménagers chez les personnes âgées risquent de disparaître à la suite d'une série d'inspections fiscales de l'Agence de revenu du Canada.

«Il se perdrait 1700 emplois, et 18 000 personnes âgées ne recevraient plus de services», a affirmé hier en conférence de presse Hélène Paradis, directrice générale de Répit-Ressources de l'est de Montréal, une des 30 entreprises d'économie sociale visées par le fisc.

Le fisc menace de leur retirer leur statut d'organisme charitable si elles n'obtiennent pas une preuve médicale de la part des personnes qui font appel à leurs services.

Ce statut permet de délivrer des reçus fiscaux à leurs donateurs lorsqu'ils font des collectes de fonds.

En perdant ce statut, les organismes risquent de voir leurs biens confisqués: c'est la sanction prévue par la loi. Ils courent le même risque s'ils y renoncent volontairement.

Et les délais sont courts: «On a 30 jours pour accepter leur recommandation, sinon, on va être révoqué et saisi», dit Hélène Saint-Laurent, d'Entre-Tiens de Haute-Gaspésie, qui emploie 110 personnes.

Selon Mme Saint-Laurent, cela signifierait la perte d'un bâtiment, d'équipements et de placements pour une valeur de 1,5 million.

Hier, la présidente du Chantier de l'économie sociale, Nancy Neamtam, a pris la défense des organismes. «Ces entreprises sont là pour rendre service, pas pour faire de l'argent, a-t-elle dit. Et l'approche du fisc nie tout l'aspect prévention. Faut-il attendre que les gens soient malades pour leur donner un service qui les aide à rester à la maison?»

Entre-Tiens de Haute-Gaspésie a fait appel aux services de l'avocat Pierre Sylvestre. «Il est peu fréquent que l'Agence décide d'inspecter tout un secteur, dit Me Sylvestre. La question qui se pose est la conséquence de ça. Les organismes qui sont là-dedans sont de bonne foi. Ils ne veulent pas maintenir leur statut. Au cours des années, ils ne s'en sont pas beaucoup servis. Ce qu'on voudrait rechercher, c'est une solution dans le cadre de la loi qui éviterait certaines sanctions.»

Une centaine d'entreprises d'économie sociale ont été créées dans la foulée du Sommet sur l'emploi, en 1996, pour répondre à trois objectifs: réduire le travail au noir, permettre la réinsertion sociale par l'emploi et offrir des services de maintien à domicile.

Certaines de ces entreprises sont des coopératives, d'autres des organismes à but non lucratif et une trentaine ont le statut d'organisme de bienfaisance. Seules ces dernières sont visées par l'inspection fiscale.

Les personnes qui font appel à ces organismes reçoivent une subvention d'au moins 4$ l'heure pour les services qui sont facturés 17$ ou 18$. Les personnes âgées et celles ayant des déficiences physiques ou intellectuelles ont une aide supplémentaire qui peut atteindre 6$, selon le revenu familial. Ce programme, administré par la Régie d'assurance maladie du Québec, a coûté 52 millions l'an dernier.

L'Agence de revenu du Canada n'a pas rappelé La Presse hier.