Denis Coderre entend continuer à aller de l'avant avec le projet de lotissement à Pierrefonds-Ouest malgré un rapport de l'Office de consultation publique de Montréal (OCPM) concluant à « un problème majeur d'acceptabilité sociale ». Invitant la métropole à protéger les espaces verts du secteur, l'opposition voit dans la réponse de l'administration un premier test pour la fin des référendums.

L'OCPM a rendu public hier son rapport au terme d'une consultation de quatre mois sur l'avenir du plus grand espace vert sur l'île. Déplorant le manque de transparence et d'information fournie par la Ville, l'organisation souligne que le projet de permettre la construction de 5500 logements a suscité un important malaise, 87 % des participants s'y étant opposés.

Ce rapport devrait pousser la Ville à réviser le projet en profondeur, estime Marie-Ève Maillé, coauteure du livre Acceptabilité sociale : sans oui, c'est non. « L'Office conclut que le risque social de poursuivre le projet dans sa forme actuelle est grand. L'OCPM ne soulève pas juste des doutes sur l'acceptabilité sociale, on parle d'un problème majeur, important. Il y a certainement ici un signe que la communauté ne consent pas au développement qu'on lui propose », résume la chercheuse.

Cependant, interrogé sur les conclusions du rapport, le maire sortant a dit ne pas y voir un feu rouge au projet de lotissement de Pierrefonds-Ouest, au contraire. « Est-ce que l'OCPM a dit qu'ils ne pouvaient pas construire ? La réponse est non », a indiqué Denis Coderre.

« Si l'OCPM avait dit "vous n'avez pas le droit de bâtir là", ça aurait tout changé. Mais ils n'ont pas dit cela, ils ont demandé plus de réponses et plus de planification. » - Le maire sortant Denis Coderre

La chercheuse Marie-Ève Maillé dénote une confusion dans la lecture que fait le maire du rapport. « J'ai l'impression que M. Coderre confond le rôle de l'OCPM et son propre rôle d'élu. Ce n'est pas à l'OCPM de "tirer la plogue" sur un projet : il fait des recommandations en fonction du mandat qui lui a été donné et, dans ce cas-ci, il répond très bien en évaluant l'acceptabilité sociale du projet. »

« PROBLÈME DÉMOCRATIQUE »

La réponse de Denis Coderre a d'ailleurs choqué Justine McIntyre, chef de Vrai changement pour Montréal, qui brigue la mairie de Pierrefonds-Roxboro. « Tant que ce n'est pas non, c'est oui ? Ce n'est pas comme cela que ça marche dans la vie. Tant que ce n'est pas oui, ce n'est pas oui », a-t-elle réagi. Pour elle, aller de l'avant alors que l'OCPM conclut à un « problème majeur d'acceptabilité sociale » représenterait un « gros problème démocratique ».

Pour Projet Montréal, la réponse de l'administration montréalaise représentera un premier test en cette ère post-référendums, le gouvernement ayant récemment mis fin à la possibilité pour les citoyens d'imposer la tenue d'un vote sur certains projets. « Dans le contexte de l'abolition des référendums, la moindre des choses serait d'écouter et de repartir à zéro », estime le conseiller Éric Alan Caldwell.

Se disant satisfait de la consultation, Denis Coderre estime toutefois que l'exercice démontre que le recours à l'OCPM fonctionne. « C'est ça que je dis quand je parle de démocratie participative. L'OCPM, c'est quelque chose de magnifique. Une consultation ne veut pas dire "crois ou meurs". Ça veut dire qu'on peut peaufiner des projets. »

ENJEU ÉLECTORAL

Chose certaine, le dépôt du rapport sur l'avenir de Pierrefonds-Ouest en pleine campagne promet d'en faire un enjeu électoral majeur. Projet Montréal compte ainsi mettre en avant sa proposition d'aménager un parc national dans le secteur plutôt qu'un lotissement immobilier. « On ne reprendra pas ce projet [de lotissement] », dit Éric Alan Caldwell.

Justine McIntyre propose quant à elle de réviser le projet pour protéger les terrains de Pierrefonds-Ouest. Elle aménagerait tout de même un boulevard urbain sur le site afin de désenclaver ce secteur de l'île lourdement touché par les problèmes de congestion.

Estimant avoir déjà augmenté la taille du secteur de Pierrefonds-Ouest qui sera protégé, Denis Coderre compte pour sa part favoriser les projets immobiliers sur le reste des terrains. Il dit ainsi vouloir contribuer à la rétention des familles sur l'île.