Une vidéo du numéro d'ouverture du défilé de la Fête nationale, qui se tenait samedi après-midi, à Montréal, a enflammé le web et avait été visionnée près de 200 000 fois en fin d'après-midi. Alors que les internautes y dénoncent un numéro raciste qui suggère une scène d'esclavagisme, le comité organisateur assure que ce n'était pas du tout l'intention derrière le tableau.

« Ça ne représente pas du tout l'esclavage. C'est très, très malheureux ce qui arrive et ce n'est jamais ce qu'on a voulu suggérer. La personne qui a conçu les costumes ne savait même pas si c'était des hommes ou des femmes qui les porteraient », a défendu Elisabeth Roy, attachée de presse du comité organisateur du défilé de la Fête nationale. 

Dans un extrait du défilé filmé et publié sur Facebook par un spectateur, la chanteuse Annie Villeneuve livre une performance de l'air connu « Mon cher Québec, c'est à ton tour... ». Le char allégorique sur lequel elle se trouve est poussé à bras par quatre personnes et est suivi par un groupe de choristes. Tous les participants de ce tableau sont des personnes blanches vêtues de blanc, exceptées quatre d'entre elles. Ceux poussent le chariot sont de jeunes hommes noirs vêtus de vêtements beiges.

Facebook s'enflamme

«J'pas sur que les organisateurs de la parade ont compris le concept de diversité », a écrit Félix Brouillet, le spectateur qui a capté la vidéo partagée près de 5000 fois en quelques heures. 

«Ça m'est apparu tellement surréaliste. Une quarantaine de Québécois blancs habillés en blanc, et quatre jeunes noirs habillés en haillons qui poussent le pharaon du Québec : Annie Villeneuve. Je veux bien qu'on raconte l'histoire du Québec, mais le sous-texte dégagé par la scène, le contexte dans lequel ils ont mis ces participants n'avait aucun sens », a-t-il dénoncé lorsque joint par La Presse.  

Le défilé présentait quinze tableaux relatant l'histoire du Québec, y compris Montréal. Celui que l'on voit dans la vidéo était le numéro d'ouverture, qui avait pour thème « La fondation de fort Ville-Marie - Montréal - 1642 ». Le comité organisateur de La Fête nationale du Québec à Montréal a également publié une vidéo de ce numéro sur sa page Facebook. Au même titre que pour l'extrait partagé par M. Brouillet, les « OMG?! » « A-Y-O-Y-E » et « QUELLE HONTE » n'ont pas tardé. 

« Qui peut m'expliquer le choix de mettre 4 jeunes hommes noirs en habit d'esclave pour pousser le char allégorique? WTF!? Ce n'est PAS ACCEPTABLE en aucune façon. Dégouttant (sic)», pouvait-on lire parmi la centaine de commentaires négatifs publiés sous la vidéo, qui a rapidement été supprimée de la page officielle de l'événement

Vêtus de parchemin et non de chiffons

Tant les participants que les organisateurs du défilé se désolent de ce qui est, au final, une interprétation complètement erronée de la mise en scène assurée par Joël Legendre. Chaque année depuis 2014, les chars allégoriques sont poussés à bras d'homme. Cette année, ce rôle était assumé par une soixantaine de jeunes de 13 à 18 ans des équipes sportives de l'école Louis-Joseph Papineau de Montréal.

« On ne s'attendait pas du tout à ça ! En tant que coach en chef, je trouvais que c'était une belle opportunité de montrer que nos jeunes du quartier Saint-Michel. Pour eux c'était un challenge physique qu'ils étaient fiers de relever », a déclaré l'entraîneur en chef de l'école, Sterve Lubin. 

« Quand on les a sollicités, on ne leur a pas demandé la couleur de leur peau ; ça nous indiffère complètement. Ils auraient pu être asiatiques, blancs, noirs... Ça n'avait rien à voir », a ajouté Elisabeth Roy. 

Le costume que les joueurs de l'équipe de football Les Patriotes portaient et que beaucoup ont perçu comme des chiffons rappelant les vêtements des esclaves représentaient en fait du papier parchemin. 

« C'est un tissu qui avait été commandé expressément pour leur costume. C'est un tissu sur lequel on voit la littérature française », a expliqué Mme Roy, ajoutant que le concepteur des costumes, Éric Noguès, était estomaqué de cette polémique. 

« On est humains, on fait partie du Québec, on habite à Montréal. Ce n'est pas une question de couleur. C'est plate que les gens nous aient perçus comme des gens représentant une race et non comme des participants. Jamais je n'aurais accepté que mes jeunes participent à quelque chose de dégradant », a conclu l'entraineur en chef, qui poussait lui-même l'un des chariots.