La haute fonctionnaire à l'origine de l'enquête de l'Unité permanente anticorruption (UPAC) à l'égard de l'ombudsman de la Ville de Montréal soutient avoir été victime de la vengeance de son ancienne patronne.

Devant le Tribunal administratif du travail (TAT) - jusque-là la Commission des relations du travail -, l'ancienne ombudsman-adjointe, Me Marjolaine Therrien, a affirmé hier avoir subi du harcèlement psychologique après avoir dénoncé la « fraude budgétaire » de l'ombudsman Johanne Savard et ses absences répétées du travail.

« De mon point de vue, c'est une vengeance de Me Savard », a déclaré Me Therrien en se référant notamment à la plainte qu'elle avait déposée auprès du Contrôleur général de la Ville de Montréal. Ce dernier s'est toutefois tourné vers l'UPAC, compte tenu de la nature des reproches formulés contre l'ombudsman et du fait que cette dernière est sous l'autorité du conseil municipal, et non pas de la direction générale.

Ainsi, l'UPAC a ouvert une enquête en 2014. En décembre de la même année, des enquêteurs ont procédé à deux perquisitions, l'une au bureau de Me Savard à l'hôtel de ville de Montréal et l'autre à sa résidence personnelle. L'UPAC a saisi principalement du matériel informatique. Vérification faite auprès de l'UPAC hier, l'enquête se poursuit toujours.

PERQUISITION

Lorsque La Presse a révélé la situation en mai 2015, Me Savard a d'abord nié qu'il y ait eu perquisition. Après s'être ravisée, elle a déclaré qu'il y avait des allégations concernant les dépenses de son bureau ainsi que des fournisseurs de services, mais qu'elle n'était pas inquiète.

Elle avait également suggéré que Marjolaine Therrien, qui a été son bras droit jusqu'en 2014, était peut-être à l'origine de l'enquête parce qu'elle avait fait une mauvaise évaluation de sa performance au travail. « Les allégations sont arrivées en concomitance avec cette situation de conflit », avait-elle indiqué à La Presse.

Selon le témoignage de Me Therrien devant le TAT hier, l'évaluation pour l'année 2014 aurait été faite après que l'ombudsman eut été mise au courant de la plainte. C'est cette évaluation qui permet d'établir la hausse salariale méritée par une employée cadre comme Me Therrien. Mme Savard a estimé que le travail de son adjointe équivalait à zéro.

Me Therrien a souligné au TAT que son ancienne patronne avait eu, dès lors, des exigences à son égard, qui représentaient « une dégradation de fonction » comme « revoir le modèle de lettre » (secrétariat) ou augmenter la visibilité de l'ombudsman (travail de communication). C'est sans compter « l'humiliation devant mes employés », a rappelé la plaignante.

Me Therrien a également raconté que Johanne Savard avait demandé à l'ensemble des employés de ne plus lui parler.

Au cours de la même période, Me Savard avait également convaincu le conseil municipal d'abolir le poste de Me Therrien, qui travaille maintenant au Contentieux de Montréal.

En plein coeur de la tourmente, une plainte a été déposée contre Me Therrien auprès du Contrôleur général.

On lui reprochait trois choses : d'avoir pris connaissance d'un rapport d'évaluation du travail de l'ombudsman effectué par l'École nationale d'administration publique (ENAP), d'avoir utilisé le télécopieur de la Ville pour envoyer sa propre plainte à la Commission des relations du travail et de l'avoir fait corriger préalablement par une employée du bureau de l'ombudsman.

Après 28 ans de service à la Ville, avec un dossier vierge, Me Therrien s'est vu imposer une suspension d'un mois sans salaire. « Je trouve ça abusif », a-t-elle déclaré après avoir affirmé qu'il s'agissait, selon elle, de « représailles, d'une punition ». « Même à distance, elle continue de me harceler », a-t-elle ajouté.

Les auditions devant le TAT se poursuivent aujourd'hui.