Excédé par le comportement «sauvage» de Postes Canada dans l'implantation de ses boîtes postales communautaires, le maire de Montréal a répliqué à coups de marteau-piqueur, hier après-midi, détruisant une installation de la société d'État dans un parc de Pierrefonds.

«La bullshit, c'est assez!», a-t-il clamé après avoir fini de pulvériser une partie de la dalle de béton qui devait accueillir de nouvelles boîtes.

Denis Coderre n'a pas semblé s'en faire outre mesure avec les peines salées réservées aux personnes qui détruisent le matériel de la société canadienne des postes. La réglementation encadrant Postes Canada «interdit» formellement le déplacement ou retrait de toute installation destinée à la livraison du courrier. Les récalcitrants peuvent être condamnés à un maximum de cinq ans de prison.

Hier en soirée, le SPVM n'avait pas reçu de plainte contre M. Coderre.

Le maire estimait que ce coup d'éclat était la seule façon pour la ville d'asseoir son autorité et de dissuader Postes Canada de s'installer ainsi dans ses espaces verts.

«Il n'est pas question qu'on se fasse manger la laine sur le dos», a-t-il dit. «Le message qu'on envoie aujourd'hui, c'est que Postes Canada doit nous respecter. [...] Il y a des gestes qui se posent qui sont sauvages, qui sont honteux, qui sont arrogants. [...] Quand vous allez faire des choses sur notre territoire, vous allez apprendre à nous parler, vous allez apprendre à nous respecter.»

Vers 16h10, des cols bleus manoeuvrant une pelle mécanique ont commencé à défaire l'ouvrage. Le maire, muni d'un casque et d'un dossard d'ouvrier de la construction, a symboliquement pris la relève avec un marteau-piqueur.

Selon l'arrondissement Pierrefonds-Roxboro, la dalle a fait son apparition au cours des derniers jours à l'entrée du parc «éconaturel» de l'Anse-à-l'Orme, près du boulevard Gouin Ouest. Aucune autorisation n'aurait été délivrée pour l'installation de la dalle et aucun préavis n'aurait été donné, selon le maire Coderre.

Postes Canada et des villes québécoises s'affrontent depuis quelques mois au sujet de l'installation de boîtes postales communautaires dans lesquelles serait concentré le courrier aujourd'hui distribué de porte en porte. Le maire de Montréal et ses homologues font valoir que la société d'État ne peut décider unilatéralement de cesser la distribution traditionnelle et encore moins d'installer des boîtes postales communautaires dans des quartiers densément peuplés.

Hier, au moment de mettre sous presse, la société fédérale n'avait pas réagi à la destruction de sa dalle de béton. Plus tôt en journée, Postes Canada avait affirmé par écrit qu'elle était «toujours disposé[e] à travailler avec les municipalités dans le but de trouver les meilleurs emplacements et de discuter des préoccupations qui sont soulevées».

«Notre objectif est de sélectionner des emplacements qui sont sécuritaires, accessibles et pratiques pour les ménages dans chaque quartier, ajoutait Phil Legault, responsable des communications. Nous serons heureux de discuter avec [les villes] de leurs suggestions pour d'autres emplacements.»

Denis Coderre s'est moqué de cette position, lâchant un éclat de rire sonore lorsqu'un journaliste lui en a lu un extrait. Il a ajouté qu'au moins une autre installation de Postes Canada dans un parc naturel - le Cap Saint-Jacques - serait demantelée par les cols bleus.

Le maire a toutefois souligné qu'il n'invitait pas les citoyens montréalais à s'attaquer eux aussi aux installations de Postes Canada dans leur voisinage.

«Ce n'est pas un buffet ouvert, chacun ne fait pas ce qu'il veut. Je l'ai fait parce que je suis maire de tous les Montréalais, c'était l'institution», a-t-il dit. «D'ailleurs, on l'a fait dans les règles, avec le casque et tout ça.»