La Ville de Montréal s'apprête à autoriser un règlement d'emprunt de 29 millions pour la phase II du développement de Pointe-à-Callière. La gestion de ce projet muséal d'envergure est entre les mains de Quartier international de Montréal (QIM), un organisme montré du doigt par l'Inspecteur général de Montréal dans un rapport accablant, il y a trois mois à peine.

Le conseil municipal sera appelé à se prononcer sur le dossier lors de l'assemblée d'aujourd'hui. Comme l'indiquent les documents remis aux élus, il s'agit notamment de soutenir financièrement la mise en valeur des vestiges du fort Ville-Marie, soit le lieu de fondation de Montréal. Le projet s'inscrit donc dans le cadre du 375e anniversaire, qui sera célébré en 2017.

Les documents municipaux n'indiquent toutefois pas qui est le véritable gestionnaire du projet. Mais des vérifications ont permis de constater que le musée Pointe-à-Callière a remis les rênes du projet entre les mains de Quartier international de Montréal (QIM), le même organisme envers lequel l'Inspecteur de Montréal émettait de sérieux doutes en mars dernier.

«Exigences inusitées»

Dans le cadre d'un autre projet ciblé comme un legs pour le 375e anniversaire de Montréal, soit la revitalisation de l'île Sainte-Hélène sous la responsabilité de la Société du parc Jean-Drapeau, QIM avait décroché le contrat gestionnaire sans qu'il y ait d'appel d'offres public. Alerté, l'Inspecteur général de Montréal a mené une enquête. Il a conclu que QIM «a imposé des exigences inusitées dans le monde municipal, ce qui a pour effet de mettre à mal la liberté de concurrence, l'égalité des chances et l'obtention du meilleur produit au meilleur prix». Le rapport de l'Inspecteur a entraîné le départ du directeur général et de la présidente du conseil d'administration de la Société du parc Jean-Drapeau.

Jointe à la fin de la semaine dernière, la directrice générale du musée Pointe-à-Callière, Francine Lelièvre, défend la décision d'avoir accordé de gré à gré le contrat de gestion à QIM, tout comme ce fut le cas pour la phase I.

«On s'est appuyés sur un avis juridique et sur l'accord des autorités de la Ville de Montréal. Je peux témoigner de la rigueur de QIM», a affirmé à La Presse Mme Lelièvre.

De son côté, le président du comité exécutif de la Ville de Montréal, Pierre Desrochers, estime que la situation actuelle n'est pas la répétition des événements du printemps avec le parc Jean-Drapeau: QIM n'est pas le donneur d'ouvrages délégué, c'est-à-dire que ce n'est pas lui qui donne les contrats. Il a toutefois fait l'estimation des coûts, aidera à la préparation des devis et suivra le chantier. Les honoraires de QIM correspondent à 3,9% du coût du projet.

«Les choses ont été resserrées parce que donner un contrat de gré à gré à un OBNL [organisme à but non lucratif comme QIM] dans un domaine comme les services professionnels où il y a de la concurrence, ce n'est pas la meilleure idée en ville. Mais dans ce cas-ci, le contrat a été attribué en novembre dernier, donc avant le rapport de l'Inspecteur. On ne refera pas toute l'histoire. On regarde vers l'avenir», a affirmé M. Desrochers.

Au moment de la signature du protocole d'entente entre la Ville et le musée Pointe-à-Callière, l'année dernière, le Service des finances avait analysé le dossier. En date du 8 août 2014, l'avis des fonctionnaires était favorable, mais ils émettaient certains commentaires sur l'implication de QIM. On y soulignait, entre autres, que toutes les données financières avaient été faites par QIM. «Aucun avis d'expert interne sur les infrastructures municipales touchées par le présent dossier n'est disponible», peut-on lire dans le document.