Que pense Chelsea Clinton du désir de sa mère de devenir présidente des États-Unis? Les centaines de personnes qui ont assisté hier à la conférence de la fille de Bill et Hillary Clinton dans le cadre de l'événement C2 Montréal ne l'ont pas su. La question ne lui a pas été posée.

Pourtant, pendant l'heure d'entrevue devant public que la jeune femme de 35 ans a accordée à Nadia Lakhdari, vice-présidente de la programmation de C2 Montréal, Hillary Rodham Clinton était l'éléphant dans la pièce.

Aujourd'hui très active au sein de l'organisation mise sur pied par ses parents, la Fondation Clinton, Chelsea Clinton a exposé les difficultés qu'ont toujours les femmes dans le monde entier à se faire une place dans le marché du travail ainsi qu'à atteindre les plus hauts échelons du pouvoir, que ce soit dans le milieu de la politique, des médias ou des affaires. «Lors du sommet de Pékin sur les femmes en 1995, 55% des femmes de 16 ans et plus étaient sur le marché du travail. En 2015, c'est encore 55%. Nous devons faire plus d'efforts pour soulever les barrières pour les femmes qui arrivent sur le marché du travail», a dit Chelsea Clinton devant un auditoire composé de chefs d'entreprise et de professionnels de l'innovation.

«Au Canada comme aux États-Unis, nous devons avoir une certaine humilité en constatant le travail qu'il nous reste à faire dans nos propres pays», a plaidé la jeune femme, avant de peindre un portrait peu reluisant du statut de la femme dans le pays dont sa mère espère être la première femme présidente.

Reculs américains

Entre autres, la jeune maman, qui a donné naissance à son premier enfant, une fille, en septembre dernier, a rappelé que les États-Unis sont l'un des neuf pays du monde - «les autres sont des îles du Pacifique qui ont moins de ressources» - à ne pas offrir de congé de maternité rémunéré aux nouvelles mères. Une situation particulièrement difficile pour celles qui, comme Chelsea Clinton, décident d'allaiter. «J'allaite toujours ma fille. Je dois organiser mes journées pour être capable de le faire; pour faire les choix qui sont les meilleurs pour moi et pour ma fille», note la détentrice d'une maîtrise en santé publique de l'Université Columbia ainsi que d'un doctorat en relations internationales de l'Université Oxford.

Chelsea Clinton notait hier que dans certains domaines, les femmes américaines ont même connu des reculs au cours des 20 dernières années. «Depuis 1995, aux États-Unis, la mortalité maternelle a augmenté. La proportion de femmes qui obtiennent des diplômes dans les domaines de la science et des technologies a diminué», a exposé celle qui pilote le programme No Ceilings: The Full Participation Project (Pas de plafonds: la pleine participation) pour la Fondation Clinton. Dans le cadre de ce projet, la fondation a récemment publié un rapport exhaustif, basé sur 20 ans de données et de statistiques, sur la participation des femmes dans 190 pays du monde.

De l'analyse à l'action

Pour que les femmes prennent davantage leur place, Chelsea Clinton croit qu'il est nécessaire de leur présenter plus d'exemples inspirants de femmes qui repoussent les limites, dans la réalité comme dans la fiction. «Jusqu'en 3e année du primaire, les filles ont les mêmes ambitions que les garçons. Elles veulent être astronautes, présidente. Ça commence à se détériorer dès la 4e année. Je pense que c'est notamment lié à un fossé dans l'imagination. Elles ne voient pas de femmes qui ressemblent à leur rêve dans la vraie vie. Il faut réduire cet écart», plaide celle qui vit sous le regard du public depuis sa naissance.

L'élection de sa mère à la Maison-Blanche serait-elle le meilleur moyen de remédier à la situation? Cette question-là n'a pas été posée non plus à la conférencière principale de C2 Montréal.