À l'heure où les artères commerciales de la métropole vivotent, un projet de supercentre commercial dans la ville de Mont-Royal pourrait bien leur asséner le coup de grâce, craint Projet Montréal, qui entend en bloquer la construction.

« Montréal ne peut pas se permettre en ce moment d'ajouter du pied carré, ni dans la restauration, ni dans l'hôtellerie, ni dans le commerce du détail », a martelé lundi Luc Ferrandez, chef de l'opposition. Son parti présentera une motion lors de la réunion du conseil du 23 février prochain pour demander l'abandon de ce projet du promoteur Carbonleo, qui a notamment créé le DIX30.

Pour le moment, peu de détails ont filtré sur le projet. Et cela devrait ralentir les ardeurs de Projet Montréal, selon le maire de Mont-Royal, Philippe Roy. « Le promoteur ne l'a pas encore lancé en détail, alors je trouve ça curieux que des élus prennent position », a-t-il déclaré. « Pour ce qu'on a vu, je pense que ça va avoir des retombées économiques extraordinaires pour la grande ville de Montréal », a-t-il ajouté, sans toutefois pouvoir avancer de chiffres appuyant ses propos.

Le promoteur Carbonleo a confirmé l'existence du projet de supercentre, mais il s'est refusé à commenter la fronde de Projet Montréal, que le maire Roy a qualifiée d'« injustifiée ».

« On ne fait pas partie de Montréal, donc on décide nous-mêmes de ce qu'on fait dans notre zone industrielle », a-t-il tranché. « Quand Montréal a ouvert le Marché central devant le centre Rockland, personne n'est venu nous consulter. »

Vendredi, Mont-Royal a indiqué que Carbonleo lui a présenté un projet pour revitaliser un terrain de 20 hectares dans un secteur industriel peu occupé situé au sud-ouest de l'intersection des autoroutes 15 et 40. La municipalité défusionnée dit avoir entrepris la modification de son plan d'urbanisme pour permettre l'arrivée de ce « projet multifonctionnel ».

Projet Montréal juge que le temps est mal choisi, alors que le commerce de détail vit des heures difficiles. « Ce serait peut-être possible dans un contexte de croissance, dans un contexte où les artères commerciales ont les moyens de se défendre. En ce moment, on n'a ni l'un ni l'autre », a déploré Luc Ferrandez.

L'opposition craint également que la création d'une salle de spectacle, à l'instar de l'Étoile du DIX30, ne vienne nuire aux autres salles montréalaises, comme le Théâtre St-Denis, le Théâtre Rialto « et même le Centre Bell », s'est inquiété M. Ferrandez.

« On veut retenir les Montréalais sur l'île », s'est défendu Philippe Roy. « On se donne, en plein coeur de l'île, un centre qui va permettre aux Montréalais de vivre l'expérience de nouveaux centres commerciaux sans traverser des ponts. »

Pour contrer l'arrivée du projet, Projet Montréal entend mener des actions de front : 

-Pression sur les élus de Mont-Royal pour les convaincre de refuser;

-Motion pour arrêter le projet de prolongement du boulevard Cavendish, dont une des branches alimenterait le site du Quinze40;

-Inciter les résidants de Mont-Royal à exiger la tenue d'un référendum pour bloquer le projet;

-Contacter les bannières qui pourraient être tentées de quitter des artères commerciales de Montréal pour le futur centre commercial afin de les en décourager.

Le maire de Montréal a réagi en fin de semaine sur les réseaux sociaux, disant vouloir se faire expliquer la « pertinence de ce centre commercial », ajoutant qu'il y en avait beaucoup à proximité. Denis Coderre se montrait également préoccupé par la question de la congestion routière dans ce secteur déjà réputé pour ses importants bouchons de circulation. Le maire doit rencontrer cette semaine certains représentants des Sociétés de développement commercial (SDC) ainsi que le maire de Mont-Royal, Philipe Roy, pour discuter du projet.

Déjà, les SDC qui gèrent les rues commerciales voient d'un bien mauvais oeil l'arrivée d'un projet Quinze40. « On n'a pas besoin de le faire à Montréal. Ces projets se font en banlieue parce que les banlieues n'ont pas de quartier dynamique comme on en a. Le DIX30, c'est une copie de ce qu'on a à Montréal. Et là, on va copier une copie de ce qu'on a déjà? Il y a quelque chose qui ne va pas », s'étonnait Mike Parente, directeur général de la Plaza St-Hubert et président de l'Association des SDC de Montréal.