Montréal a besoin d'un héliport public au centre-ville pour assurer un meilleur développement économique, selon le maire Denis Coderre, qui se dit même prêt à mettre la Ville de Montréal à contribution. À peine lancée, l'idée a toutefois été tournée en ridicule par l'opposition en plus de susciter des craintes.

Le directeur général de Montréal, Alain Marcoux, a reçu hier le mandat d'analyser l'opportunité d'aménager un héliport au centre-ville afin d'encourager le développement économique de la métropole. «Je pense qu'on a besoin d'un héliport à Montréal dans la foulée de la stratégie du centre-ville», a déclaré Denis Coderre lors d'une rencontre publique de son comité exécutif.

Un espace permettant aux hélicoptères d'atterrir à proximité du centre-ville pourrait être utile «quand on regarde les grands festivals, la Formule 1 ou strictement sur une base d'affaires», a précisé le maire. En plus de la clientèle d'affaires, un héliport public pourrait également servir pour des urgences médicales. Rappelons que le projet du CUSM prévoyait au départ un tel espace, mais ce volet a été abandonné dans la version finale du projet de superhôpital anglophone.

«Dans une métropole qui se respecte, tous les moyens de locomotion sont importants. Ça se fait à New York et à travers le monde.», affirme le maire.

On compte déjà une demi-douzaine d'héliports sur l'île de Montréal, mais aucun au centre-ville. De plus, la majorité d'entre eux est privée, servant uniquement aux entreprises qui les ont aménagés, comme Point Zero et Kruger.

En plus d'évaluer la faisabilité, le directeur général de Montréal devra analyser le financement d'un tel projet. «Ça peut être le privé, ça peut être [la Ville de Montréal], je ne suis réfractaire à rien», a précisé le maire.

Solution tournée en ridicule

L'opposition a rapidement tourné en ridicule la proposition du maire, disant que l'idée n'était qu'un écran de fumée pour camoufler les problèmes de la métropole. «On a perdu 40 000 emplois à temps plein l'an dernier et la solution de Denis Coderre, c'est un héliport. Denis Coderre dit que 2015 est l'année du transport en commun et sa solution, c'est un héliport. Il est beau le message: "Vous êtes pris dans le trafic ? Prenez un hélicoptère"», a ironisé le conseiller Guillaume Lavoie, de Projet Montréal.

Selon lui, les demandes de la communauté des affaires pour un héliport ne justifient en rien un tel investissement public. Si Montréal veut accueillir la clientèle aisée souhaitant éviter la congestion de Montréal pour assister au Grand Prix, Guillaume Lavoie estime que la métropole devrait au mieux aménager un héliport temporaire sur un terrain vacant. «Construire une infrastructure publique pour trois jours, ça ne fait pas de sens», dit l'élu.

Échec de plusieurs projets

Le centre-ville de Montréal a déjà disposé d'un héliport sur les terrains de la Société du Vieux-Port, mais celui-ci a été démoli en 2000 pour faire place au bassin Peel. Depuis, plusieurs projets de remplacement ont raté leur atterrissage.

En 2010, l'Association québécoise du transport aérien (AQTA) a proposé d'aménager un héliport sur un terrain appartenant à Montréal, près des Studios Mel's, un secteur industriel qui ne nuirait ainsi pas à la quiétude de citoyens. «Ça fait 14 ans qu'on est sur ce dossier et c'est une nécessité qu'une métropole se dote de telles installations. C'est un besoin réel», dit Jean-Marc Dufour, PDG de l'organisation.

L'AQTA n'est pas seule à caresser un projet d'héliports. Depuis 2009, le maire du Sud-Ouest, Benoît Dorais, dit avoir été approché à ce sujet par au moins trois organisations différentes, la dernière fois cet automne. Chaque fois, il dit avoir demandé en vain des assurances sur la quiétude du voisinage. «Avant que le conseil du Sud-Ouest se prononce sur un projet d'hélipad, on veut des preuves bétonnées que ça n'aura pas d'impact sur nos citoyens.»

Vérifications faites dans le registre des lobbyistes, aucun groupe n'a présentement de mandat actif pour faire la promotion d'un héliport au centre-ville de Montréal. En fait, seule une lobbyiste s'est inscrite en 2012 pour aborder ce sujet avec la Ville de Montréal au nom de l'entreprise Pascan Aviation. Jointe par La Presse, Pascan a pourtant démenti avoir envisagé un tel projet - encore moins embauché une lobbyiste pour le faire -, disant limiter ses activités à l'aviation et non au transport par hélicoptère.