Les Montréalais pourront continuer à vapoter dans les édifices municipaux même si la Ville de Montréal vient officiellement d'interdire à ses employés de le faire.

Les quelque 28 000 employés de la métropole ont reçu un message hier les avisant qu'«il est désormais interdit de faire usage de cigarettes électroniques sur les lieux de travail et dans les véhicules de la Ville de Montréal». Cette interdiction touche autant les cigarettes électroniques contenant de la nicotine que celles sans, précise le message envoyé hier matin.

«Je suis contre [la cigarette électronique]. On ne sait pas ce qu'on fume là-dedans Ce n'est pas le genre de show de boucane que j'aime», a lancé le maire Denis Coderre, en marge d'un événement public.

Voilà, cette interdiction ne touche pas les citoyens. «Elle ne s'applique qu'aux employés», a confirmé à La Presse Gonzalo Nunez, porte-parole de la Ville. Pour empêcher les Montréalais de vapoter dans ses édifices, Montréal devra adopter un règlement municipal en bonne et due forme et non une simple directive, comme celle annoncée hier. Aucun règlement du genre n'est à l'ordre du jour pour le moment.

Ce «deux poids deux mesures», irrite grandement le Syndicat des fonctionnaires municipaux. «Ça n'a pas d'allure. Tu vas voir des gens vapoter dans les bibliothèques dans la face des employés, mais tu leur dis à eux qu'ils ne peuvent pas. C'est déraisonnable. Tu rends le vapotage accessible pour tout le monde ou pas », a réagi le président des cols blancs, Alain Fugère.

Le syndicat n'a pas apprécié non plus la façon dont cet interdit aux employés «a été imposé de façon unilatérale». «On va regarder si on conteste la directive ou pas», a ajouté Alain Fugère.

Applaudissant l'interdit, l'opposition estime que la mise à l'index du vapotage dans les édifices municipaux devrait aussi s'appliquer aux Montréalais. «Ça serait contradictoire de ne pas mettre les mêmes restrictions aux citoyens», a estimé Sterling Downey, conseiller de Projet Montréal dans Verdun.

Pour le reste, l'opposition juge que la Ville fait bien de prendre les devants en interdisant le vapotage. «Je trouve que c'est une très bonne affaire de prendre des mesures préventives. Le principe de précaution s'applique comme on ne connaît pas l'impact sur la santé encore du vapotage». 

Vers une interdiction totale ?

L'interdiction totale de la cigarette électronique dans les lieux publics au Québec pourrait n'être qu'une question de temps, à en croire l'avis envoyé par la Société de transport de Montréal à ses employés. «Après discussions auprès du service de lutte contre le tabagisme du Québec, il appert qu'il est de leur intention d'inclure l'interdiction de la cigarette électronique à la Loi sur le tabac», peut-on lire dans la mise envoyée hier.

Au cabinet de la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois, on indique qu'un projet de loi à ce sujet est en préparation. «C'est toujours son intention de faire une révision de la Loi sur le tabac, la dernière révision datant de 2005», a indiqué son attachée de presse, Alexandra Bernier.

«D'autres provinces l'ont fait, pourquoi pas le Québec ?» -Marvin Rotrand, conseiller municipal de Snowdon.

Pour le moment, le Directeur de la Santé publique du Québec, «invite la population à s'abstenir de consommer les cigarettes électroniques», a-t-il indiqué dans une mise en garde sur le vapotage. «Il serait souhaitable pour les usagers qu'ils ne les consomment pas dans les lieux visés par la Loi sur le tabac. Le directeur national de santé publique du Québec invite aussi les exploitants à ne pas en tolérer l'usage dans leur établissement», indique cet avis.

Quelques provinces ont déjà commencé à légiférer. La Nouvelle-Écosse a adopté en novembre une nouvelle loi pour interdire le vapotage dans tout lieu public à partir du 31 mai prochain. L'Ontario a aussi adopté une loi pour s'assurer que le vapotage soit soumis aux mêmes restrictions que pour fumer des cigarettes régulières.

À Santé Canada, on indique que la vente de cigarettes électroniques contenant de la nicotine est interdite au pays, aucune n'ayant reçu d'homologation. «Jusqu'à présent, il n'y a pas suffisamment de preuves que les bienfaits de la cigarette électronique pour aider les Canadiens à cesser de fumer surpassent les risques potentiels», dit-on à Ottawa. Les cigarettes électroniques sans nicotine peuvent quant à elle être vendues librement.