Le couperet est tombé sur une soixantaine d'employés ayant pris part à la manifestation du 18 août à l'intérieur de l'hôtel de ville de Montréal. Au total, six ont été congédiés tandis que 57 autres écopent d'une suspension sans solde allant jusqu'à six mois.

«C'était vraiment grave. Ça brisait le lien de confiance qu'il pouvait y avoir. C'était des actes d'intimidation sans équivoque», a dénoncé Pierre Desrochers, bras droit du maire Denis Coderre. Le président du comité exécutif a rappelé que certains manifestants «se sont attaqués au bureau du maire, ont brisé des vitres».

Montréal a dévoilé hier le résultat des enquêtes disciplinaires effectuées sur 63 employés filmés le 18 août alors que plus d'une centaine de manifestants avaient pris d'assaut l'hôtel de ville. Un groupe avait notamment pourchassé le maire jusque dans son bureau, l'y assiégeant pendant une quinzaine de minutes.

Les pompiers écopent des sanctions les plus sévères, six d'entre eux sont carrément congédiés. De lourdes sanctions sont imposées à deux autres pompiers qui sont suspendus six mois tandis que 14 autres le seront pendant trois mois. Les 30 autres pompiers visés par des mesures sont suspendus d'une à quatre semaines. Des employés d'autres corps d'emploi sont aussi sanctionnés, dont un col blanc qui écope d'une suspension de six mois et un col bleu pour trois mois.

D'autres sanctions pourraient être éventuellement annoncées puisque «d'autres employés font l'objet d'une enquête», a précisé Pierre Desrochers.

Les employés pourront contester la sanction qui leur est imposée, mais leur suspension ou leur congédiement restera néanmoins en vigueur en attendant la fin des procédures.

Certains des pompiers congédiés comptaient de nombreuses années d'expérience et étaient près de leur retraite. Il n'a pas été possible de savoir si leur renvoi affectera la prise de leur retraite.

Contrairement à ce que certains médias ont affirmé hier, le chef syndical des pompiers, Ronald Martin, ne ferait pas partie des six pompiers congédiés. Celui-ci a reconnu hier que des rumeurs qui circulaient depuis quelques jours voulaient qu'il soit renvoyé, mais le président de l'Association des pompiers de Montréal a toutefois indiqué ne pas avoir encore été avisé des mesures qui lui seront imposées. Pierre Desrochers a quant à lui refusé de confirmer les sanctions imposées au syndicaliste.

Contrairement aux autres employés suspendus, le président du Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, Michel Parent, attend lui aussi encore sa sanction. Le leader syndical a été rencontré par les enquêteurs il y a quelques semaines, mais il n'a pas toujours pas reçu de lettre ou d'appel lui indiquant la sanction de la Ville à son endroit. «Je ne comprends pas pourquoi je n'ai rien reçu», s'est-il contenté de dire.

Et les policiers?

Le chef de l'opposition, Richard Bergeron, a estimé que les sanctions semblaient à la hauteur des gestes commis le 18 août, indiquant que des gestes criminels ont été perpétrés à cette manifestation. Il a toutefois regretté que la Ville refuse de rendre publics les résultats des enquêtes disciplinaires. «Il faut tout faire pour éviter que ça ait l'air d'une commande politique», a-t-il dit.

Réitérant son appel à une enquête de la Sûreté du Québec, Richard Bergeron s'indigne aussi qu'aucune mesure n'ait été prise contre les policiers qui sont restés les bras croisés lors de la manifestation. Pierre Desrochers a indiqué que le SPVM continuait de son côté son enquête disciplinaire, mais que ce processus était indépendant de celui mené par la Ville. Il a dit espérer une conclusion «dans les plus brefs délais».

- Avec Jasmin Lavoie

Sanctions:

• 6 congédiements (tous des pompiers)

• 3 suspensions de 6 mois (1 col blanc et 2 pompiers)

• 15 suspensions de 3 mois (1 col bleu et 14 pompiers)

• 22 suspensions d'un mois (3 cols blancs, 5 cols bleus, 14 pompiers)

• 10 suspensions de 2 semaines (10 pompiers)

• 7 suspensions d'une semaine (1 col bleu, 6 pompiers)

«Pour nous, c'est une commande politique»

Le congédiement de six pompiers est une commande politique de l'administration Coderre, dénonce leur syndicat, qui s'engage à défendre jusqu'au bout chacun de ses membres pour renverser les sanctions imposées hier.

«Pour nous, c'est une commande politique», a dénoncé Ronald Martin, président de l'Association des pompiers. Selon lui, rien dans la manifestation du 18 août ne justifie d'en arriver à des congédiements.

Ronald Martin a déploré que le résultat des enquêtes disciplinaires tombe le jour même où 41 pompiers, dont lui, comparaissaient au palais de justice. Ceux-ci sont accusés d'attroupement illégal, de méfaits et de voies de fait à la suite d'une enquête policière sur la manifestation. Pierre Desrochers, président du comité exécutif, a assuré que l'annonce des sanctions était une simple coïncidence.

«On avait beaucoup d'appréhensions depuis l'arrivée de Coderre. Tout s'est détérioré quand il s'est acoquiné avec le maire à l'autre bout de la 20», a déploré Ronald Martin.

Le syndicat entend déposer dès demain matin un grief pour contester les mesures disciplinaires. D'autres recours judiciaires sont aussi envisagés pour obtenir des dommages punitifs pour les désagréments provoqués par les mesures disciplinaires.

Le chef syndical a par ailleurs lancé un appel au calme à ses membres. Il les a appelés à ne pas tomber dans le piège qu'il accuse la Ville de vouloir leur tendre. Par cet appel, il espère voir des pompiers commettre «des actes isolés».