La suspension soudaine des programmes d'aide financière de la Ville de Montréal pour l'acquisition et la rénovation de propriétés a créé une onde de choc chez les propriétaires et les constructeurs de la métropole. La Ville de Montréal affirme avoir été contrainte de le faire en raison des compressions budgétaires de Québec. L'opposition officielle craint que cette décision n'accentue l'exode des familles vers la banlieue.

Mélissa Martel, 36 ans, est propriétaire d'un condo dans Hochelaga-Maisonneuve depuis moins d'un mois. Lundi après-midi, elle voulait terminer sa demande d'aide financière dans le cadre du programme d'acquisition d'une propriété de la Ville de Montréal. Elle pensait avoir droit à 4500$, une somme qui lui aurait permis d'éponger la moitié de sa mise de fonds.

La nouvelle propriétaire est allée sur le site de la Ville de Montréal pour trouver le numéro de télécopieur auquel elle devait envoyer le document manquant. C'est là qu'elle a appris la nouvelle: à 16h30 le jour même, on cesserait de prendre de nouvelles demandes pour six programmes de rénovation et d'acquisition de propriétés. La Ville de Montréal en avait fait l'annonce à 14h30, à peine deux heures avant la suspension officielle des programmes.

«La Ville a agi de façon sournoise, sans donner d'avertissement», se désole Mélissa Martel, qui a immédiatement envoyé le document manquant.

Même si elle a envoyé sa demande à temps, Mélissa Martel n'est pas assurée d'obtenir sa subvention. D'ici la fin de l'été, la Ville de Montréal devra décider comment elle entend répondre aux 1300 demandes reçues depuis le début de l'année et qui sont toujours en traitement. La Ville devra aussi décider du sort des programmes de rénovation et d'acquisition des propriétés à l'avenir.

Le budget Leitao

Depuis le dépôt du budget Leitao, Québec a cessé de financer le programme Rénovation Québec de la Société d'habitation du Québec (SHQ). En vigueur depuis 2002, ce programme donnait des subventions aux municipalités pour qu'elles mettent sur pied des programmes de rénovation destinés aux propriétaires. Ces programmes étaient financés à 50% par le programme Rénovation Québec et à 50% par les villes.

Montréal avait mis sur pied six programmes (aujourd'hui suspendus): Rénovation résidentielle majeure, Rénovation à la carte, Acquisition d'une propriété (volet remboursement forfaitaire), Stabilisation des fondations, Habitations urbaines pour familles et Bonification Accès-Logis.

«La Ville a fait des représentations auprès du gouvernement pour le sensibiliser aux impacts [de la suspension du programme Rénovation Québec] pour les citoyens de Montréal, explique Christian Champagne, chef de division à la Direction de l'habitation pour la Ville de Montréal. On espérait que les fonds seraient finalement rendus disponibles. Comme ce n'est pas le cas, on a conclu que, d'un point de vue de gestion responsable, il fallait arrêter de prendre des nouvelles demandes.»

La Ville, qui fournissait 50% des sommes, ne pourrait-elle pas maintenir les programmes en réduisant les subventions de moitié? «Ça fait partie des choses qu'on examine actuellement», répond Christian Champagne.

Christian Champagne explique que la Ville a choisi de donner un court préavis aux citoyens pour éviter d'engorger ses services avec une grande quantité de demandes sans fondement. De toute façon, dit-il, il n'existe pas de bonne façon pour annoncer ce genre de nouvelles.

«On espère que cette période-là sera la plus brève possible et qu'on pourra rétablir une gestion active des programmes rapidement», conclut-il.

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, se questionne sur le budget que l'administration du maire Denis Coderre a réservé au programme Acquisition d'une propriété dans le cadre de son Plan de fidélisation des familles.

«Dans le budget, il n'y avait aucun montant prévu pour le programme, et ç'a fait l'objet d'un débat, dit-il. On m'a dit qu'on mettrait 10 millions sur le programme et que c'était fondu dans le budget du service de mise en valeur du territoire. Est-ce que ça atteint réellement 10 millions de dollars?»

Au cabinet de Pierre Moreau, ministre responsable de la SHQ, on a refusé hier de répondre aux questions des médias. Les demandes ont été transmises à la SHQ.