Oubliez l'autobus, seul un train léger peut répondre à la demande sur le futur pont Champlain, conclut une étude gardée confidentielle jusqu'ici. Le rapport obtenu par La Presse révèle qu'un service par bus amélioré coûterait à lui seul plus de 1 milliard de dollars, soit presque autant qu'un SLR... sans offrir les bénéfices de ce dernier.

En plus de coûter beaucoup plus cher que prévu, une desserte par autobus rapides dans le corridor du futur pont Champlain créerait un goulot d'étranglement insoutenable à Montréal. Cela amènerait «un mur d'autobus» quotidien au centre-ville, une solution inacceptable «d'un point de vue technique et social».

Après avoir étudié les différents scénarios possibles dans l'axe du futur pont, la firme AECOM conclut, dans un rapport obtenu par La Presse, qu'un «système par bus ne peut répondre à la demande d'un corridor aussi achalandé» en raison de ses limites, de ses impacts et de son coût.

Les auteurs de ce «rapport final» de 300 pages, daté de mars 2013, sont formels: «seul le système léger sur rail (SLR) permet de répondre à la demande estimée dans le corridor A10/centre-ville à partir de 2021, jusqu'en 2061 et au-delà.»

Cette étude, que l'Agence métropolitaine de transport (AMT) a refusé de dévoiler jusqu'ici, est la seule à analyser dans le détail les différentes options en transports collectifs possibles pour le futur pont Champlain.

Huit modes sont considérés (le tram-train, proposé hier dans les pages Débats, n'en fait pas partie), mais seulement deux sont jugés «appropriés» pour le transport interurbain entre la Rive-Sud et Montréal: un service d'autobus amélioré et un SLR.

La grande surprise du rapport réside dans les implications d'une simple amélioration du réseau actuel d'autobus: la facture grimperait à 1,2 milliard pour un service somme toute limité. À titre comparatif, le coût du SLR est évalué entre 1,4 et 2 milliards de dollars.

«La présente étude démontre qu'un système de bus ne peut desservir la demande potentielle en 2021 sans des travaux d'infrastructures presque aussi importants que pour un SLR, sans toutefois avoir les bénéfices de la performance et de l'effet structurant généralement liés à ce dernier.»

On évalue que dès 2021, la demande pour un système de transports en commun sur le futur pont sera de 16 000 passagers par heure par direction. Or, pour répondre à ce besoin, il faudrait une fréquence cadencée d'un bus de 50 passagers toutes les 12 secondes. Cela représenterait le doublement du nombre de véhicules entrant à Montréal le matin - de 450 à 900.

Un tel achalandage nécessite des aménagements importants, selon les auteurs, notamment la construction d'un nouveau terminus au centre-ville, l'actuel étant saturé.

Il faudrait également aménager un circuit d'autobus en site propre dans l'île afin d'éviter les croisements avec la circulation. Cela exigerait d'opter pour des solutions coûteuses: soit un système en souterrain, soit un étagement des voies de circulation.

«Des aménagements aériens sont envisageables techniquement au centre-ville, que ce soit dans l'axe du boulevard Bonaventure ou des rues parallèles. Cependant, de telles structures aériennes ne sont pas acceptables dans le cadre actuel du projet Bonaventure et créeraient de nouvelles barrières physiques au centre-ville de Montréal.»

Pas que des désavantages

AECOM reconnaît que l'option autobus a certains avantages, notamment une implantation rapide, mais il considère que cet avantage ne compense pas les nombreux désavantages. En outre, le SLR offrirait une desserte plus rapide et confortable pour quelques millions de dollars de plus.

Des sources ont par contre indiqué à La Presse que peu de gens, à l'AMT et à Québec, croient qu'un train léger peut se faire sous la barre du milliard de dollars. La comparaison de coûts est donc à prendre avec des pincettes.

Le rapport évalue également deux scénarios pour le tracé du SLR: un en surface le long de l'autoroute Bonaventure, et un autre en tunnel, sous Griffintown. Mais depuis la réalisation de cette étude, l'an dernier, le second tracé semble avoir pris le chemin des oubliettes.

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Le bus (actuel)

Tracé: 13 km

Vitesse moyenne: 43 km/h

Temps de déplacement:

18 minutes

Affluence: 450 bus à l'heure de pointe du matin