Montréal a dévoilé hier son palmarès annuel des 10 sites patrimoniaux menacés à Montréal. Quatre nouveaux lieux ont été ajoutés à la liste pour 2014, soit la Maison Pierre du Calvet (Vieux-Montréal), les écoles de la rue Adam, l'entrepôt de la rue Van Horne et la grange-étable du Bois-de-la-Roche, à Senneville. Les six autres sites sont de «vieux amis» d'Héritage Montréal, au sens le plus désolant du terme. La liste noire, dans le détail.

Maison Pierre du Calvet (410, rue Saint-Paul)

Achevée de construire en 1770, cette maison est une des plus anciennes du Vieux-Montréal. Comme tous les bâtiments du secteur, son extérieur est protégé. Mais pas son intérieur, hélas. «C'est un lieu qui est dans l'ADN du quartier historique, souligne Dinu Bumbaru, d'Héritage Montréal. Il faudrait le classer individuellement et le revitaliser.» Le propriétaire du bâtiment, Ronald Dravigne, est totalement d'accord. Mais selon lui, les subventions à la rénovation sont insuffisantes. «Je n'ai plus d'argent à mettre sur cette maison. D'ailleurs, elle est à vendre...»

Écoles de la rue Adam (3603, rue Adam)

Témoins du boom démographique «canadien-français» du début du XXe siècle, les écoles de la rue Adam (Baril, Hochelaga et Très-Saint-Nom-de-Jésus) sont dans un tel état de délabrement qu'on envisage présentement leur démolition. «Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de leur donner une autre fonction, plutôt que de les sacrifier?», demande Dinu Bumbaru. M. Bumbaru rappelle que ces bâtiments ont été construits avant que le quartier Hochelaga soit annexé à Montréal (1918), ce qui leur donne une valeur ajoutée sur le plan historique.

Entrepôt de la rue Van Horne (1, avenue Van Horne)

Cet immeuble insolite du Mile End a fait l'objet de consultations publiques en 2013. Certains ont proposé de le convertir en commerces et de vitrer sa façade. Il n'en fallait pas plus pour qu'Héritage Montréal sonne l'alarme, le bâtiment ayant une «valeur exceptionnelle» sur le plan du patrimoine industriel. «C'est un emblème, ce serait dommage d'y voir apparaître des balcons», souligne Dinu Bumbaru. Il suggère que l'entrepôt soit préservé et intégré à un «réseau vert» longeant le chemin de fer du CP.

Grange-étable du Bois-de-la-Roche (292, chemin Senneville)

Créé pour le sénateur Louis-Joseph Forget, ce domaine agricole présente un triple intérêt, historique, géographique et architectural. Il aurait été en partie dessiné par les frères Maxwell (Musée des beaux-arts, tour du Château Frontenac) au tournant du XXe siècle et demeure un des derniers témoins du Montréal rural. «Ce type de bâtiment a une valeur particulière, pourquoi est-ce que ça tombe en ruines? déplore Dinu Bumbaru. On pourrait s'attendre à ce que ce soit mieux entretenu.» Le complexe fait partie du réseau des parcs de la Ville de Montréal.

Caserne Letourneux (4300, rue Notre-Dame Est)

Inspiré de l'Unity Temple de Frank Lloyd Wright, cette ancienne caserne de pompiers témoigne des grandes années de l'ancienne ville de Maisonneuve. Le Théâtre sans-fil qui est propriétaire, veut la vendre. Comme elle n'est pas protégée, rien ne garantit que les futurs propriétaires respecteront son intégrité.

Agora et square Viger (angle Berri/Saint-Antoine/Saint-Denis)

Créé en 1981 par l'artiste Charles Daudelin, cet espace est un des fleurons du patrimoine moderne à Montréal. Mais il est mal situé et mal-aimé, et la Ville souhaite le raser complètement. Le repenser? Peut-être... Le démolir?

Maison Redpath (3457, rue du Musée)

Pauvre maison Redpath! Menacée depuis 30 ans, elle a été sauvée de la démolition une première fois en 1986, puis une seconde fois en 2011. En 2013, le conseil d'arrondissement de Ville-Marie aurait accepté un nouveau projet de construction sur le site, apparemment une maison de chambres de 80 unités. Héritage Montréal parle d'un «sacrifice». Construite en 1886, la maison Redpath est un des rares témoins de l'architecture Queen Anne à Montréal.

Coopérative d'habitations de Saint-Léonard

Construit entre 1956 et 1962, ce complexe résidentiel est le fruit d'une expérience urbaine moderne et visionnaire. Plusieurs de ces bungalows ont toutefois été démolis pour faire place à des maisons qui rompent avec l'harmonie des lieux.

Forge Cadieux (815, rue Saint-Paul)

Fondée en 1870, la forge Cadieux est laissée vacante depuis 1980, ne servant que pour d'occasionnels tournages ou événements. Le réaménagement du secteur Bonaventure pourrait toutefois accélérer la disparition de ce précieux témoin des métiers d'antan, resté pratiquement intact.

Hôpital de la Miséricorde (970, boul. René-Lévesque Est)

Longtemps occupé par le centre de soins Jacques-Viger, le bâtiment cherche de nouveaux locataires et une nouvelle vocation. En attendant, ses problèmes de structure et de maçonnerie vont continuer de s'aggraver. L'ancien hôpital de la Miséricorde date de 1853.