Le spectre d'une fermeture complète du pont Champlain a plané sur le choix de la Société de transport de Montréal (STM) de fermer la ligne jaune pendant 25 fins de semaine.

> Le plan de la STM pour la ligne jaune (PDF)

Cette fermeture d'urgence du pont le plus fréquenté au Canada a en effet été évoquée à maintes reprises ce matin, lors du point de presse convoqué par les responsables de la société de transport. On a dû choisir entre trois scénarios : une fermeture du tunnel à temps plein pendant deux mois, des travaux de nuit qui se seraient échelonnés sur cinq ans et une formule mixte. Mercredi soir, on a annoncé que c'est ce dernier scénario qui a été retenu : le tunnel reliant la station Berri-UQAM à Longueuil sera fermé pendant 206 nuits à partir du 6 janvier, et 25 fins de semaine à partir du 8 mars.

Cette formule mixte, a-t-on appris lors du point de presse ce matin, offre plusieurs avantages en terme de coûts et d'impact sur les usagers. Elle est également celle qui permettrait une réaction rapide au pire des scénarios, la fermeture du pont Champlain. «S'il y avait urgence sur le pont Champlain, comme on est en mode planifié, on cesserait les travaux», a assuré Carl Desrosiers, directeur général.

Un service de navettes aux quatre minutes sera offert aux usagers, qui sont 11 600 en moyenne le samedi et 7800 le dimanche, contre 30 000 la semaine. La différence dans la durée du trajet sera «d'à peine quelques minutes», promet M. Desrosiers, évidemment en raison de la circulation automobile plus paisible la fin de semaine. «La fin de semaine, on a des bus en quantité industrielle, indique-t-il. C'est plus facile à gérer.» 





Prévus depuis «deux ou trois ans»

Opter pour des travaux de nuit aurait pu empêcher la reprise du service certains matins, notamment en raison du fort volume de poussière dégagé par le grattage du béton fissuré. Attendre davantage pour ces réparations, qui tombent «par hasard» deux semaines après l'annonce d'une fissure majeure sur le pont Champlain, était également hors de question.

«Ce ne sont pas de travaux d'urgence, ce sont des travaux planifiés», a tenu à rappeler le nouveau président de la STM, Philippe Schnobb. «C'était planifié depuis deux ou trois ans, a ajouté M. Desrosiers. Si vous le faites en planifié, c'est facile d'arrêter. En urgence, c'est impossible.»

Les travaux ont été rendus incontournables à cause de l'infiltration d'eau qui a fissuré environ 5% de la surface de béton du tunnel. Cette infiltration d'eau est inévitable, précise le directeur général : «Une journée de printemps, c'est dix millions de litres d'eau qui s'infiltrent dans le réseau du métro au complet. Nous la récupérons avec des pompes.»

Pas de travaux avant 2018

Ces travaux sont normaux, indique-t-on, pour des infrastructures qui datent de 45 ans. Les responsables de la STM ont pris soin de vérifier sur internet si les autres métros nord-américains connaissaient des fermetures semblables; ils ont découvert que c'était le cas à New York, Toronto et Boston. «C'est partout pareil, on n'a pas trouvé la pilule pour empêcher un métro de vieillir.»

Le chantier de réfection, au coût de 10 millions dont 75% sont assumés par Québec, concerne la voûte de béton du tunnel sur 4 km. C'est surtout la portion sur l'île de Montréal, qui traverse une rivière souterraine, qui serait la plus mal en point. On en profitera pour forer la voûte aux endroits où la pression de l'eau est la plus forte et installer de nouvelles canalisations.

La ligne jaune n'avait pas fait l'objet de travaux importants depuis 1998. On avait alors installé des ancrages au roc et des grillages. Il n'y aura pas d'autres travaux de cette envergure dans le réseau montréalais avant 2018, assure Carl Desrosiers. On ignore dans quel secteur ils seront alors nécessaires, «mais on va en faire, c'est clair».

«Pas des situations rêvées»

À Québec, le ministre des Affaires municipales et des Transports, Sylvain Gaudreault, a défendu la décision de la STM. « Si on ne fait pas les travaux sur la ligne jaune, vous allez me dire dans quelques années qu'il aurait fallu faire des travaux. Là, on a des mesures qui vont (permettre d') avoir le moins d'impact possible, et si jamais il y a fermeture sur le pont Champlain, ce qu'on ne souhaite pas, on va suspendre les travaux, et on va s'assurer d'avoir les mesures de mitigation le plus possible.»

Il a assuré être «en contact direct avec la STM» pour s'assurer que les mesures de mitigation appropriées soient prises. Il a lui-même été informé de la nécessité de ces travaux «il y a quelques semaines».

« C'est sûr que ce ne sont pas des situations rêvées ou idéales. Mais vous savez qu'il y a un défi d'entretien et de maintien des actifs dans le métro de Montréal, et c'est pour ça qu'il faut faire » les travaux.

-Avec la collaboration de Tommy Chouinard