L'idée de céder à Québec la responsabilité de construire un nouveau pont pour remplacer le pont Champlain a été accueillie plutôt froidement.

La première ministre Pauline Marois a confié, mardi à l'Assemblée nationale, avoir discuté de cette possibilité avec son vis-à-vis fédéral, Stephen Harper, afin d'accélérer la construction.

Mercredi, le ministre fédéral de l'Infrastructure, Denis Lebel, a soigneusement évité de s'aventurer sur ce terrain.

«Les discussions qui se passent entre les premiers ministres se passeront entre premiers ministres. Je peux vous dire qu'on est au travail; j'ai déjà dit que l'échéancier serait revu, donc ce n'est pas une surprise aujourd'hui que tout le monde nous demande de le revoir», a déclaré en vitesse M. Lebel lors d'un très bref point de presse aux Communes.

Dans un courriel transmis à La Presse Canadienne plus tard en journée, le ministre Lebel a précisé que «le pont Champlain relève du gouvernement fédéral et nous nous sommes engagés à continuer à collaborer avec tous les paliers de gouvernement pour la construction du nouveau pont».

«Nous sommes ouverts à écouter les propositions de Québec concernant le transfert de l'ensemble des ponts fédéraux dans la grande région de Montréal une fois que le nouveau pont sera construit», a-t-il ajouté.

Le maire de Montréal, Denis Coderre, a plutôt tourné la chose en dérision.

«J'ai senti un surplus d'enthousiasme du côté de Québec. Je pense que ce qui serait plus à-propos - et ce qui va probablement arriver - c'est de bâtir le pont et, par la suite, de la transférer (à Québec). Québec va payer avec quoi? Il faut être réaliste.»

Ce qui importe davantage, selon M. Coderre, c'est d'accélérer la cadence, d'autant plus qu'on ne cesse d'injecter des centaines de millions de dollars dans la réfection de l'actuel pont qui devra de toute façon être démoli.

«Ce qui m'importe, c'est une réalité économique, c'est une réalité de sécurité pour nous assurer effectivement qu'on puisse agir plus rapidement. Ce ne sont pas des fonctionnaires qui vont décider. J'ai déjà entendu des fonctionnaires faire des plans de huit et dix ans», a indiqué M. Coderre, notant que ce genre d'ouvrage avait pu être érigé beaucoup plus rapidement dans des pays aux prises avec les mêmes conditions climatiques que le Québec.

«On est capable de bâtir des ponts en trois ou quatre ans dans d'autres endroits, je ne vois pas pourquoi on ne serait pas capable d'avoir en même temps un concours de design rapide avec une infrastructure rapide pour qu'on puisse commencer les choses», a-t-il soutenu.

Le ministre Lebel a promis de déposer un plan d'affaires avant la fin de l'année et Denis Coderre mise sur cette promesse pour que les choses se mettent en branle.

«On n'a plus de temps à perdre», a affirmé le maire. «On me dit que, dans le plan d'affaires, il y aura quelque chose comme 13 scénarios. Dans ces scénarios, le nouveau pont est-il possible dans trois ans? Dans quatre ans? Dans cinq ans? Et qu'est-ce qu'on fait en attendant, les plans de contingence, les plans de mitigation?»

«Si on n'est pas capable (d'aller plus rapidement), qu'on nous le dise, qu'on nous explique pourquoi», a exigé M. Coderre qui, comme tous les intervenants du côté québécois, estime que la date de livraison initiale de 2021 ne peut plus tenir.

Par ailleurs, Denis Coderre a indiqué qu'il ne se laisserait pas distraire par des questions périphériques.

«Après ça, il y aura la question du pont à péage ou sans péage. La question du vocabulaire va être importante: que l'on ne vienne pas me dire que c'est un nouveau pont. On remplace un pont parce qu'on n'a pas le choix. Si le pont tombe, Ottawa ne paiera pas parce qu'on ne veut pas de péage? Non, il faut être réaliste», a indiqué M. Coderre, ajoutant que ces questions, comme celle du transport en commun sur le pont, pourront toujours faire l'objet de discussions mais que la priorité, maintenant, était d'aller plus rapidement vers la construction.