L'arrimage de la «super-poutre» aux chevêtres du pont Champlain ne devrait pas entraîner de débalancement ni de rupture de la structure, malgré l'ajout de cette masse de 75 tonnes sur le côté droit du pont.

En entrevue, mardi, l'ingénieure et directrice principale des projets de la société Les Ponts Jacques Cartier et Champlain Incorporée (PJCCI), Catherine Tremblay, a assuré que le poids de la poutre préfabriquée, en acier, a été évidemment pris en compte, «dès sa conception», en 2009. Ces calculs ont été revérifiés au cours des derniers jours, pour confirmer que la structure du pont pourra supporter la super-poutre de 75 tonnes, qui devrait être mise en place dès la fin de semaine prochaine, à moins d'un contretemps majeur.

«La poutre fissurée est rattachée au tablier du pont, et le poids de ce tablier dépasse largement celui de la super-poutre. Ce n'est donc pas significatif, et je ne vois pas comment l'installation de cette poutre pourrait déséquilibrer la structure», a affirmé Mme Tremblay, en réponse aux craintes soulevées mardi dans plusieurs médias par l'architecte Pierre Brisset.

La société fédérale prévoit installer cette super-poutre par-dessus la poutre fissurée du pont Champlain, découverte le 12 novembre dernier lors d'une inspection régulière. Les tentatives de renforcement de cette poutre par de la fibre de carbone ayant échoué, PJCCI a décidé de recourir à cette solution, imaginée il y a près de cinq ans, pour soulager la poutre de béton fissurée.

L'opération doit se dérouler au cours du prochain week-end, si les conditions météo le permettent. Elle exigera l'utilisation de deux grues de 160 tonnes chacune, pour hisser la super-poutre et la maintenir en position, au-dessus de la poutre fissurée, le temps qu'on la fixe aux chevêtres du pont.

Les chevêtres sont les têtes de pilier du pont, qui s'allongent en pointe vers les côtés de la structure. Les sept rangées de poutres longitudinales qui composent le tablier du pont Champlain reposent sur ces chevêtres, qui ont, eux aussi, subi des dommages importants au fil des années.

Un architecte inquiet

Après avoir consulté les plans originaux du pont, qui révèlent l'existence d'ancrages un peu sommaires, entre les piliers et les chevêtres, l'architecte Pierre Brisset s'est inquiété, mardi, de la possibilité qu'une masse de

75 tonnes accrochée à ces chevêtres provoque un déséquilibre de la structure et un effondrement partiel du pont.

La directrice principale des projets de la société fédérale a assuré que le risque soulevé avait été pris en compte, et que les chevêtres du pont Champlain ont fait l'objet de travaux de renforcement majeurs ces dernières années.

Lors de l'installation de la super-poutre, les deux grues de 160 tonnes qui hisseront cette masse occuperont l'équivalent de trois voies de circulation, vers le centre du pont. On a créé une sorte de «tampon» sur lequel seront stationnées les deux grues géantes. La présence de ce «pad» permettra de répartir le poids de la grue sur une grande superficie du pont, plutôt que sur la seule partie de la structure où elle reposera.

Durant toute l'opération, a ajouté Mme Tremblay, ses capteurs installés sur la poutre fissurée et sur d'autres poutres voisines ou vulnérables permettront de surveiller, en temps réel, le comportement des structures de béton, en présence de ces énormes engins.