La décision de Québec de tourner le dos au projet de centre de compostage au complexe environnemental de St-Michel annoncée, 24 heures après que Denis Coderre l'ait annoncé, représente une intervention inacceptable dans la campagne électorale, déplore la présidente du comité exécutif, Josée Duplessis.

«Je suis surprise, très surprise, a déclaré Mme Duplessis, élue sous la bannière de Projet Montréal, le parti de Richard Bergeron. Nous assistons à une immixtion dans le débat électoral. On est dans une hystérie collective d'une campagne électorale. Il faut relaxer, ne plus parler de ce sujet jusqu'après les élections.»

Ce désaveu de Québec pourrait coûter plus de 100 millions, puisque Montréal devra vraisemblablement acheter un autre terrain et pourrait perdre ses subventions prévues de près de 60 millions. Le retard de plusieurs années occasionnera également une inflation de ce projet estimé à 135 millions.

Le ministre de l'Environnement, Yves-François Blanchet, a annoncé par communiqué ce matin qu'il retirait son appui au projet d'aménager un des quatre centres de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage à St-Michel. Il a expliqué sa décision par le fait «l'acceptabilité sociale n'est pas au rendez-vous».

Le ministre Blanchet a invité la Ville de Montréal à trouver un autre site. «Nous reconnaissons les efforts réalisés par la Ville de Montréal pour identifier des sites adéquats, a-t-il expliqué par communiqué. Je ne souhaite pas appuyer un projet qui a été très clairement rejeté par la population et par les élus du secteur.»

Josée Duplessis a rappelé que le choix de quatre sites pour le traitement des déchets, dont celui de Saint-Michel, avait pris trois ans. «Si on en cherche un autre, ça va prendre cinq ans parce qu'il n'y a pas d'autre site, estime la présidente du comité exécutif. On a voté les changements de zonage, les règlements d'emprunt, les contrats pour rédiger les devis. La prochaine décision sera à prendre par le nouveau conseil municipal.»

En faveur du projet, le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron a qualifié l'intervention de Québec d'«extrêmement malheureuse.»

Richard Bergeron demande même au gouvernement de cesser d'intervenir dans les dossiers montréalais d'ici l'élection du 3 novembre. «Je souhaite que ce soit la première et dernière fois que le gouvernement s'immisce dans la campagne.»

Visiblement irrité par la prise de position de Québec, Richard Bergeron s'est présenté comme le seul candidat libre de toute affiliation politique provinciale et fédérale. «Je vais être un maire indépendant, le seul à ne pas avoir un patron à Québec ou Ottawa. Les Montréalais seront mes seuls patrons.»

Coderre se félicite

Cette décision de Québec survient au lendemain d'une sortie de Denis Coderre qui s'engageait à «tirer la plogue» sur ce projet. «Le message qu'on envoie, c'est que quand Denis Coderre dit quelque chose, il y a une réaction immédiate. Vous en avez la preuve aujourd'hui», s'est félicité le candidat à la mairie.

Il a présenté le désaveu de Québec comme «une bonne nouvelle dont il faut se réjouir». Sa prise de position après des années de campagne des opposants au centre de compostage était «la cerise sur le sundae», illustre-t-il.

«À cause de mon expérience, parce que je connais la politique, je veux démontrer à quel type de maire ils vont avoir affaire. Montréal va s'imposer, Montréal est la métropole, on ne sera pas dans la salle d'attente. C'est ça être maire de la métropole: c'est se rendre incontournable.»

Denis Coderre convient qu'il faudra trouver un autre site tout en s'assurant que les retards ne feront pas perdre la subvention de 80 millions d'Ottawa. «On va refaire nos devoirs. Nous autres, on a été cohérents. C'est la victoire de la cohérence.»

Le candidat Marcel Côté, qui réclamait un moratoire, aussi s'est réjoui de la décision de Québec. «C'est clair que des citoyens étaient lésés. Je suis heureux, on va reprendre le processus, on va consulter les gens.»

Joly toujours en faveur

Mélanie Joly, qui a présenté son premier groupe de candidats ce matin, a maintenu son appui au centre de compostage malgré le désaveu du gouvernement. «Québec peut prendre ses décisions. Nous, on est d'accord (avec le centre de compostage).»

Elle a qualifié de «profondément aberrantes» les annonces de ses adversaires à la mairie Denis Coderre et Marcel Côté concernant le futur centre de compostage du Complexe environnemental de Saint-Michel. «Le centre de compostage, je suis pour. Il y a eu plusieurs études, c'était une question d'équité territoriale. (S'y opposer), c'est un exemple flagrant de "pas dans ma cour". On est d'accord avec le projet et on va faire en sorte qu'il se réalise.»