Dysfonctionnement, confusion et décentralisation excessive : après quatre mois au chevet de Montréal, le comité présidé par l'ex-ministre Jacques Léonard a rendu un diagnostic sévère et proposé une soixantaine de recommandations, dont certaines susciteront vraisemblablement la controverse.

«La Ville ne peut rester dans cet état plus longtemps, dit le rapport. Ces problèmes peuvent et doivent se corriger.»

En point de presse, le maire Michael Applebaum a assuré être d'accord «à 100%» avec les recommandations. «C'est un rapport très complet, solide, audacieux. Il est vrai qu'il fait un constat sévère, mais je crois qu'il est juste et lucide. Après l'avoir lu, j'ai été très heureux d'avoir pris la décision de mettre ce comité sur pied en novembre dernier. C'est une des bonnes choses que j'aurai faites comme maire de Montréal.»

Dans le contexte des révélations de la commission Charbonneau, on note d'entrée de jeu l'«absence d'une culture éthique solidement ancrée chez certains élus et employés de la Ville de Montréal». Pour lutter contre la collusion et la corruption, on propose de déterminer quels sont «les postes vulnérables à la corruption et à la collusion: surveillants de chantier, émetteurs de permis» et de «favoriser la rotation du personnel».

On propose également de la formation et la vérification systématique des antécédents des employés promus.

C'est cependant au chapitre de la répartition des pouvoirs entre les arrondissements et l'administration centrale que les recommandations risquent de provoquer des frictions. On suggère notamment que les directeurs d'arrondissement soient dorénavant nommés par le directeur général de la Ville et que les responsables des finances locaux relèvent du service central. On demande à Québec de «revoir la répartition des compétences» et d'«arrimer les allocations budgétaires».

Afin de s'assurer que les recommandations du comité Léonard soient suivies, on propose carrément d'écarter les élus et de mettre sur pied un comité de fonctionnaires composé notamment du directeur général, du directeur des finances et du contrôleur général.



Le comité propose en outre de transformer le mandat de l'actuelle commission d'examen des contrats en une «commission de reddition de comptes».

En ce qui concerne le fait d'écarter les élus, le maire Applebaum reconnaît que ce geste empiète sur «l'autonomie des élus». «Au risque de vous surprendre, je pense que ce n'est pas une mauvaise chose, a avoué le maire.  Le rapport Léonard interpelle souvent le gouvernement du Québec, et il a raison de le faire.» Le maire a dit «douter» que les élus montréalais acceptent de leur propre gré de telles limites à leur pouvoir. Il se donne un mois pour mettre sur pied le comité de suivi composé de fonctionnaires.

Louise Harel, chef de Vision Montréal, estime que le comité Léonard «a fait une bonne job». «On peut s'en réjouir. Elle est là pour durer et pour influencer l'organisation de la Ville et son administration.» Elle qualifie cependant les recommandations sur l'éthiques de «plus faibles», rappelant que son parti demande toujours la nomination d'un commissaire à l'éthique. Quant à la centralisation de l'administration, elle la voit comme un «renforcement du coeur de Montréal».