Dans la quasi-indifférence et à l'unanimité des élus, Montréal a considérablement durci le 18 décembre dernier sa politique d'octroi des contrats. On sait depuis vendredi dernier que les entreprises coupables de collusion, comme Dessau, peuvent être bannies pour cinq ans. Ce qu'on sait moins, c'est que cette refonte de la Politique de gestion contractuelle entreprise il y a quatre mois contient de nombreuses autres surprises.

La vingtaine de modifications permettent en effet de punir les lobbyistes, les membres des comités de sélection, les fonctionnaires et les élus qui briseraient les règles et truqueraient les appels d'offres. En posant un geste d'éclat controversé la semaine dernière, le maire Michael Applebaum a promis que ce ne serait pas le dernier. Voici un survol des nouvelles mesures qui lui permettront de tenir parole.

Expulsé du comité de sélection

Tout membre d'un comité de sélection chargé d'analyser un appel d'offres devait auparavant «avertir sans délai» les responsables du comité s'il avait des liens avec une des entreprises qui déposaient une soumission. Il devra maintenant le «déclarer sans délai» et pourrait, à la discrétion de la Ville, être expulsé du comité.

Quand un appel d'offres était lancé et jusqu'à ce que le contrat soit accordé, il était obligatoire de ne communiquer qu'avec le responsable désigné de l'appel d'offres. On peut maintenant contacter le contrôleur général si on juge le comportement de ce responsable suspect. Enfreindre cette règle entraîne dorénavant un bannissement des contrats durant un an.

Le fameux article 2.2

Intitulé Infractions passées et admissibilité, l'article 2.2 utilisé la semaine dernière a été complètement réécrit. La Ville pouvait déjà interdire de contrats pendant cinq ans une entreprise dont un administrateur, un employé ou un sous-traitant avait été reconnu coupable par un tribunal de collusion. On y ajoute maintenant le fait d'avoir «admis avoir participé à de tels actes». L'entreprise est responsable de toute personne qui lui est «liée» depuis cinq ans.

Pots-de-vin amers

Il n'est plus nécessaire d'avoir une décision du tribunal associant l'entreprise à des pots-de-vin. Dorénavant, le soumissionnaire affirme «qu'à sa connaissance personnelle et après une vérification sérieuse», aucune personne liée ne s'est prêtée à cette activité. S'il y a aveu ou condamnation devant la cour par la suite, l'entreprise est écartée pendant cinq ans.

Lobbyistes sous la loupe

Le travail des lobbyistes sera considérablement compliqué par les nouvelles mesures. Les entreprises devaient déclarer que toute communication d'influence avait été faite conformément aux lois. Elles doivent maintenant les détailler, écrire qui a tenté d'influencer quel élu ou fonctionnaire. Une infraction à cet article peut valoir une exclusion des contrats pendant un an. Même sévérité s'il y a lobbying entre le dépôt de la soumission et l'octroi du contrat.

Appels d'offres casher

Il était déjà interdit à une entreprise d'embaucher, pendant un an, tout fonctionnaire ayant contribué à l'élaboration d'un appel d'offres auquel elle a participé. Cette interdiction est considérablement élargie, empêchant notamment «toute personne liée au soumissionnaire» d'embaucher ce fonctionnaire. Briser cette règle entraîne une exclusion de trois ans.

Liens d'affaires déclarés

Les liens d'affaires entre les entreprises et les personnes chargées de la rédaction des documents de l'appel d'offres doivent être déclarés. Sinon, l'entreprise verra le contrat résilié et ne pourra plus faire affaire avec la Ville pendant un an.

Suivre la trace des fautifs

Un tout nouvel article, le 7.4, vise clairement à empêcher les transferts d'actifs d'entreprises prises en défaut. Tout soumissionnaire doit déclarer qu'il n'a acquis aucun bien provenant d'une entreprise bannie, et ce, dans les deux dernières années. Aucune peine n'est prévue en cas d'infraction, à part la résiliation du contrat.