Le jour même où Michael Applebaum a annoncé la création d'une escouade policière consacrée à la lutte contre la collusion et la corruption, le nouveau maire de Montréal s'est rapidement retrouvé sur la défensive, en niant faire l'objet d'une enquête. La Presse a toutefois appris que l'Unité permanente anticorruption (UPAC) a récemment reçu des informations jugées «sérieuses» sur un dossier de dézonage qui l'impliquerait.

L'Unité permanente anticorruption (UPAC) a reçu des informations jugées «sérieuses» sur un dossier de dézonage douteux à Montréal qui impliquerait Michael Applebaum et le crime organisé, selon ce qu'a appris La Presse. Après avoir reçu hier la visite des enquêteurs de la commission Charbonneau, le maire intérimaire de la métropole a toutefois tenu à assurer qu'il n'était visé par aucune enquête.

Au printemps dernier, l'UPAC a reçu des informations sur des transactions immobilières douteuses concernant Michael Applebaum, mais les policiers ont finalement décidé de fermer le dossier. Depuis, ils ont toutefois reçu de nouveaux renseignements suffisamment crédibles pour qu'ils s'intéressent de nouveau à celui qui est devenu maire de Montréal à la mi-novembre.

Les informations reçues récemment concernent un changement de zonage pour un projet immobilier qui impliquerait le crime organisé, selon nos sources. L'UPAC a toutefois refusé de commenter le dossier.

Avant de diriger la métropole, Michael Applebaum était président du comité exécutif et maire de l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce (CDN-NDG). Il a également longtemps présidé le comité consultatif en urbanisme de son arrondissement. Le fait qu'un élu travaillant toujours comme courtier immobilier se retrouve à la tête de ce comité, qui se penche notamment sur les changements de zonage, avait à l'époque fait l'objet de nombreuses critiques.

M. Applebaum a toujours soutenu que son poste ne lui avait pas permis de prendre connaissance d'informations confidentielles qu'il aurait pu utiliser à son profit. Ce n'est qu'en 2009, après que le maire Gérald Tremblay l'eut nommé responsable des sports et des loisirs au comité exécutif, que M. Applebaum a quitté la présidence du comité consultatif en urbanisme. Il a également décidé cette année-là de ne pas renouveler sa licence de courtier immobilier.

Rencontre avec la commission Charbonneau

Michael Applebaum a révélé hier matin qu'il a rencontré les enquêteurs de la commission Charbonneau à leur demande. Puis, en début d'après-midi, Le Devoir a publié en ligne un article selon lequel les enquêteurs s'intéressent à des transactions immobilières douteuses conclues à l'époque où il dirigeait CDN-NDG. Le maire a convoqué la presse en fin d'après-midi pour une deuxième fois afin de nier catégoriquement ces informations.

«Je ne peux pas vous parler [du contenu de notre rencontre], mais l'article dans Le Devoir n'est pas vrai. Il n'y a pas d'enquête sur Michael Applebaum. Il n'y a pas eu de question sur des transactions immobilières», a-t-il dit.

Le porte-parole de la Commission, Richard Bourdon, a confirmé que Michael Applebaum avait rencontré des enquêteurs, sans préciser les sujets abordés. «On n'enquête pas sur des individus, mais sur des systèmes, des pratiques qui pourraient être en place», a-t-il précisé.

De fait, la commission Charbonneau doit éviter de nuire au travail mené par l'UPAC. Il est donc plausible que ses enquêteurs n'aient pas abordé les informations qui intéressent maintenant les policiers.

Cette nouvelle survient le jour même où M. Applebaum a annoncé la création, au Service de police de la Ville de Montréal, d'une escouade affectée aux contrats municipaux, une décision qui a d'ailleurs pris l'UPAC par surprise, selon nos sources. Le maire a assuré qu'il n'avait pas devancé cette annonce pour qu'elle coïncide avec sa rencontre avec les enquêteurs de la commission Charbonneau. «Non, je continue à travailler comme maire et je vais prendre les mesures nécessaires pour faire le ménage à la Ville. Ça n'a rien à voir», a-t-il dit.

L'opposition s'est dite surprise d'apprendre que la commission Charbonneau s'intéresse au maire intérimaire. «Les élus, comme les fonctionnaires, doivent montrer patte blanche et collaborer aux enquêtes. M. Applebaum a affirmé qu'il allait pleinement collaborer à l'enquête. On espère avoir plus d'informations d'ici à la réouverture des travaux de la commission Charbonneau, le 21 janvier», a indiqué le conseiller Gaétan Primeau, de Vision Montréal.

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a pour sa part dit faire confiance à la commission Charbonneau et à ses enquêteurs.

- Avec Karim Benessaieh