Le maire de l'arrondissement de Rosemont - La Petite-Patrie, François Croteau, qui soupçonne que son arrondissement se «fait voler par la mafia», vient d'envoyer à l'UPAC 19 contrats de construction de trottoirs, de travaux de voirie et de déneigement adjugés depuis 2009, a appris La Presse.

Il s'agit de dossiers complets, qui comprennent les soumissions rejetées à la suite de l'appel d'offres. Le maire du Plateau-Mont-Royal s'apprêterait à faire la même chose.

«Nous avions le choix entre pleurer à la télévision et jouer les victimes ou agir», a expliqué M. Croteau en entrevue.

François Croteau, de Projet Montréal, a fait cette révélation à la suite de la publication dans La Presse, hier, d'une enquête qui démontre que ce que le témoin Michel Leclerc a qualifié devant la commission Charbonneau de «cartel des trottoirs» est toujours actif. Les entrepreneurs tireraient certains prix à la hausse, en particulier les puisards, facturés à des prix jugés exorbitants.

«Il n'y a peut-être pas de collusion dans tous les dossiers envoyés à la police, dit l'élu montréalais. Mais on doit tout faire pour arrêter ça. Je ne peux pas accepter que des bandits continuent de voler des fonds publics. Je veux que ces gens-là soient punis et qu'ils payent.»

Le maire explique que cette étape «policière» était devenue inéluctable: l'arsenal de mesures mises en place par les élus de Projet Montréal pour prévenir ou bloquer la collusion et la valse des extras ne suffisait plus.

«Notamment, nous avons déjà un avocat qui révise les appels d'offres et les plans et devis pour s'assurer que des gens ne profitent pas d'omissions pour facturer des dépassements de coûts.» De plus, la surveillance des travaux est faite à l'interne et non plus par des firmes privées. On invente aussi de nouveaux aménagements pour déstabiliser les acteurs habituels en plus de limiter le nombre de puisards à déplacer.

Dans l'arrondissement voisin de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension, la mairesse Anie Samson, de Vision Montréal, a carrément rejeté pour la seconde fois en deux ans une soumission pour la réfection de trottoirs parce qu'elle demandait 25% de plus que le coût estimé à l'interne. L'an dernier, c'était 40% de trop. «J'ai donné le mandat à nos services de faire eux-mêmes les trottoirs, cette année, dit-elle. On étudie la possibilité que cela devienne définitif.»

En entrevue hier matin avec Paul Arcand, au 98,5 FM, le maire Michael Applebaum a admis du bout des lèvres qu'il n'avait «pas vu» venir, lorsqu'il présidait le comité exécutif, la nouvelle flambée des prix imposés par le cartel des trottoirs, après une pause forcée en 2009 et 2010. Il a reconnu qu'il faudrait du temps avant que de nouveaux entrepreneurs du Québec, du Canada et même de l'étranger, arrivent sur le marché à Montréal, dans l'hypothèse où la plupart des entreprises de construction perdraient leur droit de soumissionner à cause de leurs agissements si le projet de loi 1 est adopté.