Les scandales dans le domaine de la construction font des dommages collatéraux au Service de police de la Ville de Montréal. Un officier de haut rang du SPVM vient d'être muté à d'autres fonctions, loin des enquêtes, a appris La Presse. La raison: sa belle-famille est dans la ligne de mire de Revenu Québec et de l'escouade Marteau, qui a déjà fait des perquisitions dans certaines de ses entreprises de construction, à Laval.

Patrick Lalonde, assistant-directeur, est le conjoint de Barbara Mergl. Les Mergl sont une famille de dirigeants de sociétés lavallois qui seraient proches du maire Gilles Vaillancourt.

Selon le registre des entreprises, le père, Anthony, est à la tête d'Industries A. Mergl avec sa fille Barbara. Il dirige aussi Nepcon Transports et Nepcon inc. avec plusieurs autres membres de la famille.

Les Mergl possèdent aussi une kyrielle d'autres entreprises, dont Construction Mergad, Les gestions Mergad, Mergl excavation et Les Paysages Mergl.

Construction Mergad et Nepcon ont fait l'objet de perquisitions le 11 octobre par l'escouade Marteau (UPAC), dont fait partie le SPVM, et le Bureau de la concurrence du Canada, dans le cadre d'une vaste enquête sur l'attribution des contrats à Laval.

En janvier 2012, la firme Nepcon devait notamment près de 560 000$ à Revenu Québec; le fisc a ainsi bloqué les comptes bancaires de l'entreprise. La firme s'est ensuite placée sous la protection de la Loi sur la faillite. Construction Mergad est elle aussi sous le coup d'une procédure similaire depuis l'été dernier.

Des démêlés par le passé

Ce n'est pas la première fois que la famille Mergl a des démêlés judiciaires. En 2000, Nepcon a été reconnue coupable de collusion dans l'attribution de contrats de déneigement du ministère des Transports du Québec dans la région métropolitaine et condamnée à payer une amende élevée.

La plupart de ces entreprises obtiennent depuis des années une part conséquente des contrats d'infrastructures attribués par la Ville de Laval (Nepcon est longtemps arrivée au deuxième rang, derrière les entreprises d'Antonio Accurso) et la Société de transport de Laval (STL).

Lors de son témoignage devant la commission Charbonneau, Lino Zambito a affirmé que Nepcon et Mergad faisaient partie d'un groupe organisé qui se partageait les contrats à Laval.

Les Mergl ont aussi leurs entrées dans le monde politique.

Jean-Jacques Beldié, un de leurs beaux-frères, est conseiller municipal à Laval et président de la STL.

Cette famille figure parmi les donateurs réguliers du parti PRO du maire Vaillancourt, ainsi que du Parti libéral du Québec (plus de 20 000$ au PLQ de 2001 à 2008 pour Anthony et René Mergl, 800$ en 2010 pour Barbara Mergl). Dans une moindre mesure, la famille a aussi contribué à l'Action démocratique du Québec et au Parti québécois.

Barbara Mergl a tenté sa chance en politique fédérale en 2004. Elle avait affronté Raymonde Folco pour l'investiture du Parti libéral du Canada dans la circonscription de Laval - une campagne secouée par des allégations d'écoute clandestine.

Muté subitement hier

Patrick Lalonde n'a pas rappelé La Presse. En fin de journée, hier, le commandant Ian Lafrenière, porte-parole du SPVM, a téléphoné pour expliquer que la situation de M. Lalonde, bien que connue, «a pris une tournure différente» à la suite des récentes perquisitions. Les événements se seraient précipités hier en après-midi, dans la foulée d'un premier appel de La Presse.

Loin de Marteau

«Il vient d'être rencontré par le chef Marc Parent, dit M. Lafrenière. M. Lalonde va être muté à d'autres tâches pour préserver le lien de confiance, mais conserve sa fonction. Il ne s'occupe pas de dossiers en lien avec Marteau ou d'autres enquêtes du genre.»

En plus de son emploi au SPVM, Patrick Lalonde est aussi dirigeant et propriétaire de la garderie privée subventionnée Papillon bleu, boulevard Cléroux, à Laval - à côté du siège de Construction Mergad.

Au ministère de la Famille, on explique que M. Lalonde a obtenu un permis le 31 janvier 2011 pour exploiter cette garderie de 60 places à 7$.

La Ville de Laval a vendu ce terrain à Patrick Lalonde et sa société à numéro en juin 2010, au coût de 232 000$. Sa valeur est actuellement estimée à 181 000$ au rôle d'évaluation de Laval.

«Nous étions au courant que M. Lalonde avait des intérêts dans une garderie», a précisé Ian Lafrenière.