L'administration Tremblay avait promis de «corriger les erreurs du passé» et de financer adéquatement les arrondissements. Ceux-ci recevront 70,5 millions de plus dans leurs coffres d'ici deux ans, et pourront surtout compter sur des revenus indexés en fonction de l'inflation et de la hausse de valeur des propriétés.

En contrepartie, la Ville établira des normes uniformes, notamment en matière de déneigement et d'enlèvement des ordures, selon la «réforme du financement» présentée hier par le président du comité exécutif, Michael Applebaum. Le partage des responsabilités sera «clarifié», dans le respect de l'autonomie des arrondissements, a précisé le numéro deux de la Ville.

«Nous cherchons tous à améliorer la qualité de vie des Montréalais. Je suis convaincu que ce que nous proposons ici va atteindre son but. Nous avons une formule qui répond à l'ensemble des demandes.»

Cette réforme, qui sera appliquée en deux temps d'ici 2014, fera en sorte qu'«on va arrêter de parler de structures et de sous-financement», a-t-il assuré. Il s'agissait pour lui de corriger des iniquités provoquées par la naissance tumultueuse de la nouvelle Ville, «issue d'un mariage forcé et d'un divorce manqué».

Les deux partis de l'opposition se sont toutefois dits déçus de cette réforme, dénonçant notamment le flou entourant certaines mesures (voir encadré).

Dix cents aux arrondissements

Selon ce qu'a annoncé M. Applebaum, les transferts de la ville centre, gelés depuis 2009, vont dorénavant être indexés automatiquement selon l'indice des prix à la consommation. Ce seul ajout permettra aux arrondissements de compter sur 36 millions supplémentaires d'ici 2014.

Pour «favoriser l'autonomie et l'imputabilité des arrondissements», l'administration Tremblay leur cède un espace fiscal, soit 10 cents par 100$ d'évaluation. Le taux de la ville centre - 1,01$ en 2012 - et les transferts vers les arrondissements en seront diminués d'autant, de sorte que la mesure aura un «effet neutre» sur le contribuable.

Cette mesure aura peu d'effet sur les finances des arrondissements à court terme - moins de 4 millions d'ici 2014. Elle leur permettra cependant à l'avenir de «profiter du développement immobilier et des hausses de valeurs foncières sur leur territoire», a expliqué M. Applebaum.

Pour venir en aide aux arrondissements les moins bien pourvus, on propose une «mise à niveau» de 9,7 millions l'an prochain. La liste des arrondissements qui en profiteront ainsi que la répartition des sommes n'ont pas été dévoilées.

Enfin, les arrondissements pourront encaisser 100% des revenus liés à la vente des terrains et immeubles municipaux sur leur territoire. Ils n'ont actuellement droit qu'à 20% de ce montant. On estime qu'ils disposeront ainsi de 3,5 millions supplémentaires en 2013. On leur offre en outre d'empocher la totalité des revenus de panneaux-réclame, soit 800 000$.

À partir de 2014, les budgets seront établis selon des paramètres objectifs - longueur des rues, population, fréquentation des services. Au total, les transferts de la ville-centre augmenteront de 7,3% d'ici 2014.

Enveloppe fermée

Au chapitre des responsabilités, la Ville imposera dorénavant des normes de services dans des domaines comme le déneigement des voies collectrices et l'enlèvement des ordures. Les arrondissements recevront un financement «dédié» pour donner ces services, qui ne pourra servir à un autre usage.

Ils pourront cependant décider de bonifier ces services, en puisant dans leur propre budget, a expliqué M. Applebaum.

Déception pour l'opposition

La réforme du financement proposée hier est une «déception» pour le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron. «On n'a pas les réponses qu'on attendait, et on ne les aura pas avant le dépôt du budget 2013. À quoi ont servi les cinq derniers mois?»

Selon lui, en offrant une partie de l'espace fiscal aux arrondissements tout en diminuant les transferts, «on fait semblant de nous donner des cadeaux».

En ce qui concerne la redéfinition des responsabilités, il estime que cet exercice est en fait «un énorme effort de recentralisation» dans lequel «la ville centre se donne le droit de se mettre le nez dans les services de l'arrondissement».

La chef de l'opposition officielle, Louise Harel, affirme quant à elle que l'indexation des transferts selon l'IPC est «une bonne nouvelle». Elle s'inquiète cependant du manque de détails en ce qui concerne la péréquation et la correction des iniquités. «Rien n'est chiffré.»

La possibilité que les arrondissements puissent décider du taux d'impôt foncier ne trouve pas grâce à ses yeux. «La mauvaise nouvelle, c'est qu'à partir de 2014, il pourrait y avoir 19 taux de taxation différents. Ce n'est plus à chacun ses besoins, c'est à chacun selon ses moyens.»