Pendant quatre ans, le directeur général du parti de Gérald Tremblay était payé à titre de consultant par la firme de génie-conseil Roche, une entreprise qui a reçu plusieurs millions en contrats municipaux à Montréal.

Christian Ouellet, qui a dirigé Union Montréal de 2004 à 2008, a confirmé à La Presse hier qu'il était payé par Roche toutes ces années. «C'étaient des mandats occasionnels sous forme de per diem», avoue-t-il d'emblée.

Christian Ouellet raconte qu'il travaillait déjà comme consultant pour la firme de génie en 2004 lorsqu'il a été recruté par Gérald Tremblay pour diriger son parti à temps plein. Union Montréal savait qu'il allait lui donner la victoire, dit-il. «Je suis un mercenaire, moi, un organisateur, et on connaît ma notoriété», lance-t-il.

De 2006 à 2008, Roche et les consortiums dont elle fait partie ont obtenu des contrats municipaux à Montréal d'une valeur de plus de 8 millions. Il a été impossible d'obtenir les chiffres de 2004 à 2006 avant de mettre sous presse.

Mais M. Ouellet ne croit pas avoir été en conflit d'intérêts.

«J'ai informé Roche que j'avais accepté l'offre du maire et que, dans les circonstances, je ne pouvais en aucun cas m'occuper de développement des affaires dans l'île de Montréal», se souvient-il.

Jamais il n'a tenté de favoriser un projet de Roche auprès des élus, dit-il, en se décrivant plutôt comme un consultant en communications. Il raconte avoir préparé un plan de communications qu'il a présenté à France Michaud, vice-présidente de Roche chargée du développement des affaires. Mme Michaud a été arrêtée par l'escouade Marteau en 2011. Elle est accusée de corruption dans les affaires municipales à Boisbriand.

Pas astronomique

Ni Roche ni M. Ouellet n'ont voulu dévoiler les honoraires qu'il a reçus de la firme. «Ce ne sont pas des sommes astronomiques», affirme M. Ouellet.

En février 2008, Christian Ouellet a quitté Union Montréal pour devenir directeur général de la Société du parc Jean-Drapeau (SPJD).

«Quand il a été nommé là, il nous a avisés. Nous avons mis fin au contrat. Il se peut qu'il y ait eu un peu de chevauchement, des délais administratifs. Mais tous les contrats que nous avons obtenus au parc Jean-Drapeau ont été obtenus à la suite d'appels d'offres. Et ce n'étaient pas de gros contrats», explique Jacques Thivierge, vice-président chez Roche.

M. Ouellet confirme qu'il a brièvement cumulé les deux sources de revenus.

«Je suis entré en fonction [à la SPJD] le 3 mars 2008. Je les ai informés que, pour moi, le mandat était terminé. Et le 31 mai 2008, j'ai présenté ma dernière facture à Roche», dit-il.

La SPJD dit avoir accordé 1,5 million en contrats à des firmes de génie, dont 23% à Roche, sous le règne de M. Ouellet. Elle a licencié ce dernier le 30 mars dernier, mais assure que ses liens avec la firme n'ont rien à voir avec son départ.

L'organisme paramunicipal est aux prises avec des dépassements de coûts dans la réfection du restaurant Hélène-de-Champlain et fait l'objet d'une enquête du vérificateur général.

Au cabinet du maire, l'attachée de presse Martine Painchaud a été avare de commentaires.

«Christian Ouellet, en tant que directeur général, se rapportait au conseil de direction du parti et au président du parti. Pas au maire», souligne-t-elle.

L'opposition s'inquiète. «Ce lien de proximité ouvre la porte à énormément de questions, surtout si l'on considère les résultats des enquêtes à Mascouche et à Boisbriand. Quel était l'intérêt de travailler à la fois chez Union Montréal et chez Roche? Gérald Tremblay doit s'expliquer», a dit la mairesse de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles, Chantal Rouleau, au nom de Vision Montréal.

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Christian Ouellet

Christian Ouellet est devenu directeur général du parti du maire en 2004. Il avait piloté la campagne électorale du parti en 2001. Auparavant, il avait été attaché politique et directeur des campagnes de recrutement et financement au Parti libéral du Québec (PLQ) de 1973 à 1983, puis président bénévole de la Commission d'organisation du PLQ en 1989 et 1990. Il a aussi travaillé au cabinet de relations publiques National. Il fut un collaborateur de l'ex-ministre libéral Marc-Yvan Côté, qui a été responsable du développement des affaires chez Roche.