Contrainte de payer les frais d'avocats de son vérificateur général, Jacques Bergeron, la Ville de Montréal veut interjeter appel de cette décision.

Dans sa requête déposée hier, la Ville estime que la juge Guylaine Beaugé a erré en plusieurs occasions en donnant raison à M. Bergeron le mois dernier. «À notre avis, cette décision est erronée en droit», a expliqué Gonzalo Nunez, porte-parole, qui précise que les honoraires en question s'élèvent déjà à plus de 300 000 $.

Le vérificateur général poursuit Montréal pour l'«intrusion sans précédent» dont il affirme avoir été victime à partir de mars 2011, lorsqu'on a intercepté ses courriels. Le fond de la question n'a pas encore été débattu.

En parallèle, M. Bergeron demandait que ses honoraires d'avocats puissent être payés à même son budget de fonctionnement.

Il souhaitait que plusieurs phrases contenues dans la défense de la Ville en soient retirées, et il demandait en outre que tous les documents interceptés soient confidentiels.

Depuis le 2 septembre, la Ville refuse de payer les honoraires d'avocats liés à cette cause.

Première erreur de la juge Beaugé, selon la requête de la Ville: avoir estimé que M. Bergeron avait «un droit sérieux à faire valoir au fond» et qu'on devait donc lui garantir le paiement de ses honoraires.

Ce n'était pas la véritable question à poser, plaide-t-on : la juge aurait dû se demander s'il avait droit au paiement par la Ville.

Un précédent «dangereux»

Ensuite, la Ville estime que la juge n'a pas interprété correctement l'article 604 de la Loi sur les cités et villes, qui précise les cas où une municipalité doit payer pour la défense d'un employé.

Cet article couvre les cas où le fonctionnaire est «défendeur, intimé, accusé ou mis en cause».

On relève qu'il n'y a aucune disposition pour le cas où le fonctionnaire est le demandeur ou le requérant, «à plus forte raison dans une poursuite contre son employeur».

«La Ville n'a pas à payer les frais d'avocats de ceux qui intentent une poursuite contre la Ville, estime Gonzalo Nunez. Si on applique le raisonnement de la juge de la Cour supérieure, cela créera un sérieux précédent qui pourrait forcer la Ville à financer des poursuites judiciaires contre elle-même, aux frais des contribuables, ce qui est inconcevable.»

Enfin, la juge Beaugé avait ordonné l'exécution immédiate de son jugement, soit le paiement des honoraires, que la Ville en appelle ou non.

Or, Jacques Bergeron n'a pas démontré qu'il n'avait pas les moyens de payer ses frais d'avocats, estiment les procureurs de la Ville.

Ils demandent que le vérificateur général dépose un cautionnement afin de rembourser, en cas de défaite, les honoraires que la Ville aurait versés.

Le bureau du vérificateur général s'est refusé à tout commentaire.