La rentabilité du recouvrement de l'autoroute Ville-Marie pourrait être compromise si Montréal souhaite protéger à tout prix la vue de son hôtel de ville sur le mont Royal, soutiennent les promoteurs du Quartier de la santé.

L'arrondissement de Ville-Marie mène actuellement une consultation pour revoir les hauteurs maximales de construction dans le centre-ville. Tandis que, à l'ouest, le plafond a été haussé le long de l'autoroute Bonaventure, à l'est, il a été abaissé derrière l'hôtel de ville pour éviter d'obstruer le coup d'oeil sur la montagne. La Ville estime que cette vue joue «un rôle marquant pour l'image de Montréal» auprès des touristes et dignitaires, peut-on lire dans son document de présentation.

Un plafond plus élevé demandé

Or, le Quartier de la santé, qui pilote deux projets immobiliers autour du CHUM, estime que ce plafond de 25 mètres nuira grandement à leur rentabilité. Du coup, l'idée de recouvrir l'autoroute Ville-Marie pour y ériger des bâtiments pourrait avoir du plomb dans l'aile. «La mise en oeuvre des changements proposés réduira l'attrait du projet du Quartier de la santé et rendra moins avantageux d'un point de vue économique le recouvrement de l'autoroute Ville-Marie», peut-on lire dans le mémoire des promoteurs.

En août, le maire Gérald Tremblay avait plaidé en faveur du recouvrement de l'autoroute, estimant qu'il représenterait «un investissement au rendement illimité. Il donnerait une plus-value inestimable au Quartier de la santé et aux projets immobiliers privés, dont celui de la Société Radio-Canada».

La mise en valeur des terrains situés entre le CHUM et le Palais des congrès doit permettre d'ajouter 600 000 pieds carrés d'espace de bureau, l'équivalent de 10 terrains de football. Les coûts de ces projets risquent d'être plus importants si le plafond n'est pas haussé, indique Mario Monette, président de Technoparc Montréal.

Pour assurer la rentabilité de ses projets, le Quartier de la santé demande que son plafond soit augmenté à 40 mètres. Selon les évaluations des promoteurs, la construction de bâtiments de cette hauteur ne boucherait pas la vue de la terrasse de l'hôtel de ville ou du belvédère voisin. Le Champ-de-Mars perdrait toutefois son coup d'oeil sur la montagne.

L'arrondissement de Ville-Marie a préféré attendre le dépôt du rapport sur la consultation publique, prévu en février, avant de faire des commentaires.

Le terrain voisin de l'hôtel de ville n'est pas le seul à être touché pour assurer la vue sur le mont Royal. Un îlot au coeur du siège social d'Hydro-Québec a vu son plafond abaissé de 210 mètres à 65 mètres pour éviter qu'un bâtiment n'obstrue la vue à l'hôtel de ville.

Dinu Bumbaru, d'Héritage Montréal, juge important de préserver cette rare fenêtre sur le mont Royal au coeur de la ville. Après tout, la métropole lui doit son nom, soumet-il. Ce dernier ne croit pas que couvrir l'autoroute Ville-Marie par une rangée de bâtiments représente la meilleure solution pour réparer cette «cicatrice» urbaine. «On a malheureusement l'habitude de corriger avec des remèdes pires que le mal. On ne peut pas remplacer une tranchée par une muraille d'édifices de bureaux. On est en train d'enfermer dans un carcan le Vieux-Montréal.»