Les principaux syndicats de la Ville de Montréal sont furieux de voir leurs régimes de retraite montrés du doigt pour expliquer la hausse des dépenses et des taxes municipales dans le dernier budget. Policiers, pompiers, professionnels, cols blancs et cols bleus accusent l'administration Tremblay de tourner vers eux les projecteurs pour faire oublier leur mauvaise gestion des finances municipales.

«La réaction du maire me fâche, me choque, parce que s'il y a des hausses de taxes à Montréal, c'est attribuable au maire seulement et non pas aux régimes de retraite», dénonce Yves Francoeur, président de la Fraternité des policiers de Montréal. Celui-ci soutient au contraire que la Ville a économisé 500 millions entre 1997 et 2007 en prenant congé de cotisation dans la caisse de retraite.

«C'est un secret de Polichinelle que, depuis plusieurs années, l'administration municipale paie de 25% à 40% de trop pour tous les contrats publics. Sur 1 à 2 milliards de contrats, on parle de 250 à 800 millions, alors jeter le blâme sur les régimes de retraite... c'est bien plus de la mauvaise gestion de la Ville qu'il est question», affirme Yves Francoeur.

Même frustration chez les cols blancs où l'on digère mal d'être ainsi montrés du doigt pour la deuxième année de suite afin de justifier les hausses de taxes. «C'est choquant qu'ils aient décidé cette année de mettre l'accent sur nos régimes de retraite. L'an passé, c'était à cause de nos conditions de travail», a dénoncé Monique Côté, présidente du Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montréal.

Les pompiers avalent eux aussi de travers le dernier budget. «On crie au loup, mais ce qu'on oublie, c'est qu'une crise financière, c'est temporaire. Oui, on a eu des pertes catastrophiques en 2008, mais on a eu de forts rendements positifs en 2009 et 2010», indique Ronald Martin, président de l'Association des pompiers de Montréal.

Les cols bleus reconnaissent que les régimes de retraite éprouvent des difficultés, mais estiment que l'administration municipale a elle aussi plusieurs problèmes à régler. «Les 103 élus de Montréal, c'est plus que Vancouver, Toronto et Ottawa ensemble. Alors, quand ils disent qu'ils ont un problème financier, qu'ils fassent le ménage dans leur propre cour», dénonce Michel Parent, président des cols bleus.

Malgré leur colère, les cinq syndicats, qui représentent près de 90% des employés municipaux, se disent ouverts à revoir leurs régimes de retraite, mais «pas à n'importe quel prix», dit Monique Côté. Déjà, plusieurs solutions ont été trouvées, selon elle. «On a accepté de fusionner les 15 régimes de retraite des cols blancs en un seul, ça va représenter des économies énormes en frais de gestion. Mais ça, ils n'en parlent pas», déplore Mme Côté.

Le Syndicat des professionnels de Montréal doute quant à lui des chiffres avancés par la Ville, selon laquelle les régimes de retraite coûteront 609 millions en 2012. «On a commencé à négocier, mais on a l'impression que le maire négocie plus à travers les médias que directement avec nous à la table. On nous arrive avec des solutions, mais on ne sait pas encore quel est le problème. Est-ce passager à cause des marchés ou est-ce permanent à cause de la démographie?», demande Gisèle Jolin, présidente du Syndicat des professionnels.

La Ville assure que le problème est loin d'être passager. «Quand les gens prennent leur retraite après 30 ans de service et ont encore 30 ans de vie devant eux, il y a un coût à ça», dit Jean-Yves Hinse, directeur capital humain de Montréal. L'administration demande un partage égal des coûts des régimes, le report de l'âge de la retraite et un partage des déficits.