Le métro, les autobus et les trains sont bondés. La fréquentation des transports collectifs bat des records. Les sociétés de transports ont des projets qui se chiffrent dans les dizaines de milliards de dollars et qui font rêver de prolongements du métro, de grands axes de bus express, d'un train léger entre Montréal et la Rive-Sud, de «tramways aériens» à Laval.

La brutale réalité, c'est que les milliards nécessaires à ces grands projets n'existent pas. Et que les sommes actuellement disponibles ne suffiront même pas, d'ici 10 ans, à maintenir les réseaux actuels.

«En matière de financement, les transports collectifs s'en vont directement dans un mur», affirme Florence Junca-Adenot, professeure associée au département d'études urbaines et touristiques de l'UQAM et membre active de l'Alliance pour le financement des transports collectifs au Québec.

Pas de développement

Le rythme actuel des investissements de Québec «ne couvre même pas les dépenses prévues pour le maintien des infrastructures, le remplacement des autobus et des voitures du métro dans la région métropolitaine, précise Mme Junca-Adenot. On ne parle même pas d'améliorer les services. Juste du maintien des infrastructures et du matériel.»

C'est dans ce contexte que Transports 2000 Québec, organisme consacré à la défense des usagers et à la promotion des transports collectifs, tient aujourd'hui un forum public d'une journée, pour proposer des solutions à l'impasse actuelle et éviter que les transports publics ne plongent une fois de plus dans une crise financière.

Des représentants des sociétés de transports en commun du Canada, des États-Unis, de la région de Montréal et du reste du Québec présenteront des bilans de leur situation en matière de financement. En soirée, un comité d'experts échangera aussi avec le public pour faire le point sur les progrès des dernières années et réfléchir aux solutions possibles pour continuer sur cette lancée.

Un vent d'incertitude plane depuis peu sur les sociétés de transports en commun du Québec, malgré les augmentations importantes de clientèle observées partout en province.

La première Politique québécoise sur le développement des transports en commun, qui a apporté un vent de fraîcheur en permettant l'amélioration ou la création de nouveaux services, vient à échéance à la fin de l'année.

Les programmes de financement qui l'accompagnent ont été reconduits pour un an. Après, c'est l'inconnu. En octobre, le ministre des Transports, Pierre Moreau, a promis une «grande consultation» aux dirigeants des sociétés réunis en congrès à Québec pour définir les termes d'une nouvelle politique, promise pour 2013.

L'insuffisance des fonds est aussi manifeste en matière d'immobilisations. Selon les données financières du gouvernement du Québec, les fonds disponibles pour les transports en commun s'élèvent à 2,9 milliards pour cinq ans, environ 600 millions par année, jusqu'en 2015. À elle seule, l'Agence métropolitaine de transport (AMT) aurait besoin de 17 milliards, sur une période de 10 ans, pour réaliser les projets prévus à son plan stratégique.

«Le Fonds du gouvernement qui est consacré aux routes et aux transports en commun, le FORT, va être déficitaire à partir de 2013-2014, selon les prévisions financières de Québec, explique Florence Junca-Adenot. Il n'y a pas d'argent. Et l'argent ne viendra pas des autres postes de dépenses du gouvernement comme la santé ou l'éducation, ils manquent tous de ressources. Il faut trouver d'autres sources de financement.»

La règle du 1%

Dans un mémoire soumis aux participants, aux fins de discussion, Transports 2000 recommandera qu'«un minimum de 1%» du produit intérieur brut du Québec soit consacré aux transports collectifs. Cela représenterait des investissements supplémentaires de 1 milliard de dollars, chaque année, par rapport au financement actuel.

Pour amasser les fonds nécessaires, ajoute le président de l'organisme, Robert A. Dubé, Transports 2000 propose notamment d'étendre la surprime de 1,5 cent de la taxe sur l'essence, payée depuis 2010 dans la région métropolitaine, à l'ensemble de la province. Le stationnement devrait aussi être mieux encadré «et utilisé comme source de financement».