La Ville de Montréal a intenté cette semaine une action en justice pour tenter de récupérer 90 000$ de fonds publics qu'elle a remis «par erreur» à des entrepreneurs proches de la mafia.

Dans une requête présentée à la Cour supérieure, la Ville se plaint du fait que les deux entreprises, Gestion Arcuri et Construction Lopresti, «refusent ou négligent» de lui rendre l'argent qu'elle leur a versé en trop.

L'affaire remonte à 2003. À la suite d'un accord avec les autorités municipales, les firmes se sont vu confier les tâches de promoteur et de constructeur d'infrastructures dans un nouveau lotissement de l'arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles.

L'accord prévoyait que la Ville leur verserait des «subventions d'aide à la transition pour les travaux d'infrastructures résidentiels», qui se sont élevées à 690 000$.

Mais en raison d'une erreur de calcul, de l'argent a été versé en trop, dit la Ville: «Le 20 juin 2009, par erreur, la Ville de Montréal a toutefois transmis aux parties défenderesses une somme de 91 959,47$», dit la poursuite.

Le document précise que, à la suite d'une révision, les fonctionnaires se sont rendu compte de leur erreur. Une facture a été envoyée pour demander un remboursement. Avec le temps, le remboursement demandé a été ajusté et c'est maintenant 112 989$ que la Ville souhaite récupérer.

Selon le Registre des entreprises, Gestion Arcuri appartient à Giuseppe Arcuri, Johnny Renda et Domenico Arcuri. Le père de ce dernier, qui porte le même prénom, est un membre notoire de la mafia italienne depuis les années 70.

Selon des documents de la GRC, Domenico fils a de surcroît assisté à une importante réunion de la mafia le 22 décembre 2005 au café Consenza, quartier général du clan Rizzuto. Son nom figure d'ailleurs souvent dans l'exposé de la preuve de l'opération Colisée. La SQ a ouvert une enquête l'an dernier lorsque La Presse a révélé que les Arcuri avaient pris le contrôle d'une entreprise de décontamination des sols.

Quant à Construction Lopresti, elle appartient à un certain Joseph Sciascia et à Rosa Lumia Lopresti, veuve du mafioso Joe Lopresti, assassiné en 1992. Lopresti était un voisin immédiat et grand ami de Vito Rizzuto. Outre ses activités dans la construction, il a souvent été décrit comme un lien entre les familles mafieuses Bonnano, à New York, et Rizzuto, à Montréal. En 1980, il a accompagné Vito Rizzuto à New York pour le mariage de Giuseppe Bono, chef d'une famille mafieuse en Italie. Il a été arrêté pour trafic d'héroïne peu après, mais les accusations ont été retirées.

La Ville s'inquiète-t-elle des liens familiaux des entrepreneurs subventionnés dans cette affaire? Son porte-parole, Gonzalo Nunez, répond que, pour que l'on puisse écarter une entreprise d'un appel d'offres, il faut qu'elle ait contrevenu à la Politique de gestion contractuelle de la Ville. «Nous allons prendre tous les moyens légaux pour récupérer les sommes versées en trop à ces entreprises puisque ces sommes appartiennent aux contribuables montréalais», a-t-il dit.