Noyé sous des milliers de réclamations pour des inondations et des refoulements d'égout, Montréal a décidé de faire le grand ménage dans la plomberie de ses citoyens. Un règlement obligera dorénavant les nouveaux propriétaires, ceux qui ont subi une inondation ou qui rénovent la tuyauterie de leur sous-sol, à installer l'équipement nécessaire pour éviter que l'eau ne s'invite dans leur résidence lors des fortes pluies.

Ces équipements, ce sont essentiellement des clapets antirefoulements et une fosse de retenue, vers laquelle une pompe envoie l'eau. Si une inspection révèle des défauts et que le propriétaire refuse de les corriger, la Ville se donne le droit de procéder aux travaux et de lui envoyer la facture. On s'attend à utiliser ce recours ultime surtout pour venir en aide aux locataires dont les propriétaires seraient introuvables ou insouciants.

«Avec les changements climatiques, de plus en plus de citoyens seront touchés par le phénomène, estime Hervé Logé, chef de section à la Division de la gestion durable de l'eau. Il y a des gens qui vont subir des refoulements une, deux, trois ou quatre fois. Si on ne fait rien, rien ne va changer.»

Une habitation correctement construite, selon les normes en vigueur depuis plus de 80 ans, ne devrait théoriquement pas subir de refoulement d'égout, dit M. Logé. Selon diverses analyses de la Ville, dans 90% des cas de refoulement d'égout, le clapet était mal installé ou carrément inexistant. En outre, près d'un propriétaire inondé sur deux avait déjà fait une réclamation. Les demandes d'indemnisation ont par ailleurs fait un saut vertigineux en moins d'une décennie: alors que la Ville a reçu 618 réclamations entre 2000 et 2004, elle en a reçu 8091 entre 2005 et 2009. En 2010, elle a reçu 870 réclamations d'une valeur moyenne d'environ 10 000$. En février dernier, la Cour supérieure a par ailleurs autorisé un recours collectif au nom des 450 propriétaires inondés dans Rosemont-La Petite-Patrie en juillet 2009.

Entrepreneurs incompétents

La Ville assure avoir considérablement augmenté ses investissements dans le réseau d'assainissement, qui sont passés de 31 à 79 millions par année entre 2006 et 2009. «Mais c'est comme une autoroute: il est impensable de la dimensionner pour qu'il y ait zéro congestion au départ des vacances de la construction, illustre M. Logé. Un égout, ce n'est pas un trou noir, il y a forcément une capacité limitée.»

Outre les programmes d'inspection, la Ville va fournir aux entrepreneurs un guide de normes précises pour les installations antirefoulements. «Nous avons constaté que les gens qui font les travaux ne les font pas toujours correctement», explique le chef de section. L'équipement coûte environ 300$; son installation, elle, dépend essentiellement de l'état du plancher du sous-sol à défaire et peut coûter considérablement plus cher. Ce sont les arrondissements qui seront les maîtres d'oeuvre de ce nouveau règlement, qui devrait entrer en vigueur le 1er juillet prochain, sauf à Pierrefonds-Roxboro, où on vise le 1er septembre. Trois arrondissements, soit Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles, Plateau-Mont-Royal et Sud-Ouest ont refusé d'y adhérer, au motif que la situation n'est pas problématique sur leur territoire.