Le maire de Montréal, Gérald Tremblay, a sorti un lapin de son chapeau hier: il a affirmé avoir la preuve, par courriel, que la Sûreté du Québec avait donné le mandat à des fonctionnaires de «faire des vérifications» dans l'affaire de l'espionnage à l'hôtel de ville.

Cette révélation a été faite lors d'une entrevue avec Paul Arcand, sur les ondes du 98,5 FM. Le mystérieux courriel a finalement été envoyé aux médias en fin d'après-midi. Il ne contenait aucune confirmation de la déclaration du maire.

Le courriel, daté du 3 mai dernier et caviardé, révèle en fait que le conseiller en sécurité informatique à la Ville Michel Nantel a demandé à la Sûreté du Québec «une copie (numérisée si possible) des mandats de perquisition» qui lui ont été présentés les 15 mai, le 29 septembre et le 1er novembre 2010. En réponse, le lendemain, 4 mai 2011, la SQ lui a envoyé une copie des trois mandats en question -dont on ignore la teneur ni qui ils visaient. Le courriel provient du Service des enquêtes sur l'intégrité financière/Division corruption. Le document ne contient aucune référence à une autorisation que des fonctionnaires de la Ville auraient pu avoir de la SQ pour fouiller, notamment, les courriels du président du conseil, Claude Dauphin.

Ce scandale avait été révélé par La Presse le 11 avril dernier, et suivait de deux mois la révélation que les courriels du vérificateur général, Jacques Bergeron, avaient également été épiés en 2010.

«Je peux vous dire qu'on a un courriel de la SQ qui a donné trois mandats à des représentants de la Ville de Montréal de faire des vérifications, a déclaré hier le maire Tremblay à la radio. Je ne rentrerai pas dans les détails: nous avons eu trois mandats de la SQ pour faire des vérifications sur certains dossiers que nous avons transmis à la SQ. Essentiellement parce que des fois, ils n'ont pas accès à certaines informations et ils ont besoin de la collaboration de la Ville.»

Le dernier mot à la SQ

Lorsque la controverse autour de l'espionnage des courriels de M. Dauphin a éclaté, le maire avait déjà affirmé que son contrôleur général, Pierre Reid, avait agi à la demande de la SQ. Le service de police avait alors nié avec vigueur: «En aucun temps la Sûreté du Québec n'a suggéré ou demandé aux représentants de la ville de procéder à l'interception ou récupération de courriels», avait précisé un porte-parole. Il a été impossible d'obtenir un nouveau commentaire sur ce dossier hier.

À l'hôtel de ville, le porte-parole Darren Becker a reconnu que le courriel mentionné par le maire, dans la version envoyée aux médias, ne contient pas d'autorisation explicite aux fonctionnaires de la Ville de fouiller dans les courriels d'un élu. Il a suggéré, sans confirmer que cela a été le cas, que ces autorisations ont pu être incluses dans les trois mandats de perquisition qui sont toujours secrets.

«La Ville ne pourrait pas commenter davantage parce que c'est de l'information confidentielle, a-t-il expliqué. Le courriel prouve qu'il existe trois mandats de perquisition, mais dont le détail ne sera pas communiqué. On va continuer à travailler avec la SQ.»

Pour le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, «c'est la Sûreté du Québec qui détient la réponse» à ce dernier rebondissement. «Le maire nous dit qu'il a reçu le mandat de la SQ, et il nous laisse entendre que les gens de la SQ ne savaient pas ce qu'ils disaient. C'est le service de police qui est visé et attaqué, on va attendre sa réponse.»