Alors qu'il s'était présenté devant les élus pour commenter son rapport annuel, le vérificateur général de Montréal, Jacques Bergeron, a plutôt fait face hier à un barrage de questions sur sa propre intégrité de la part de membres du parti du maire Gérald Tremblay.



Question après question, les élus d'Union Montréal, le parti majoritaire, ont interrogé M. Bergeron sur l'enquête dont il est l'objet et sur le caractère houleux de ses rapports avec l'administration Tremblay. À tel point que la chef de Vision Montréal, Louise Harel, a accusé le parti du maire de «transformer le conseil en tribunal».

«Vous avez passé six mois assez difficiles, a ainsi lancé au vérificateur général le conseiller Lionel Perez. Vous avez fait l'objet d'une enquête du contrôleur général, il y a eu intrusion dans vos courriels. N'est-il pas raisonnable de dire que monsieur et madame Tout-le-Monde pourraient avoir des raisons de croire que vous êtes en conflit d'intérêts avec la Ville?»

Pas de conflit d'intérêts

M. Perez et certains de ses collègues ont aussi demandé au vérificateur d'expliquer pourquoi il avait consacré 24 pages de son rapport à «l'espionnage» de ses courriels par la Ville. La Presse a révélé en février que le contrôleur général, Pierre Reid, avait ouvert les courriels du vérificateur. M. Reid a quitté ses fonctions lorsqu'on a appris que ses services avaient également lu les courriels du président du conseil, Claude Dauphin.

«Je ne suis pas en conflit d'intérêts avec la Ville, a répondu Jacques Bergeron. Je suis là pour protéger la Ville, les élus et la population. Je suis attaqué et je cherche à me défendre.»

La Ville a expliqué en février que des allégations concernant le vérificateur avaient justifié les intrusions dans sa boîte de courriel. M. Bergeron est notamment soupçonné d'avoir offert des contrats de traduction à sa belle-soeur. Hier, le leader d'Union Montréal, Marvin Rotrand, lui a même demandé qui avait assuré la traduction de son rapport. «Je réponds au contenu du rapport remis hier, pas à d'autres questions», a rétorqué le vérificateur.

La dernière fois que le vérificateur général s'était présenté devant le conseil, c'était en juin 2010, peu de temps après la remise de son rapport annuel. En février dernier, il avait refusé une invitation du maire à se présenter devant le conseil. Gérald Tremblay voulait alors que Jacques Bergeron s'explique sur une série d'allégations d'irrégularités qui le visaient.

Mandat trop large

Le vérificateur général a remis cela hier, alors que le parti du maire lui a ordonné de venir s'expliquer sur son rapport préliminaire concernant le service BIXI. M. Bergeron avait déjà annoncé en matinée qu'il ne se présenterait pas à cette convocation parce que certaines données étaient «en cours de validation». À 14h, il a plutôt rencontré les journalistes dans un édifice voisin pour leur présenter son rapport annuel. Il a refusant de revenir sur les circonstances de l'espionnage de ses courriels, mais il a longuement expliqué son différend avec la firme de vérificateurs externes Samson Bélair Deloitte&Touche. Celle-ci a remis un rapport de vérification des comptes du vérificateur général «avec réserve» parce qu'elle n'a pas eu accès aux contrats, notamment le fameux contrat de traduction obtenu par la belle-soeur de M. Bergeron. Celui-ci estime que les vérificateurs externes ont dépassé leur mandat, qui consiste selon la loi à vérifier les comptes du vérificateur général.

«Pour la reddition de comptes, je n'ai aucun problème à ce qu'une instance appropriée, comme le ministère des Affaires municipales, enquête, a expliqué le vérificateur général. C'est la première fois que le vérificateur externe élargit son mandat. Sa fonction est de vérifier les comptes, nous avons deux avis juridiques qui le confirment.»