L'organisme qui exploite les BIXI a menacé le gouvernement d'enlever tous les vélos en libre-service s'il n'aidait pas la Ville de Montréal à effacer sa dette de 37 millions de dollars avant 14h jeudi, a appris La Presse.

L'administration du maire Gérald Tremblay a transmis le message au ministère des Affaires municipales. Le gouvernement refusait le plan de financement soumis par la Ville, mais, selon nos sources, il ne voulait pas porter l'odieux de mettre fin à l'aventure des BIXI.

Des négociations très serrées se sont déroulées toute la semaine entre les dirigeants de la Ville et les hauts fonctionnaires du Ministère. Une entente, assortie de plusieurs conditions, a été conclue peu avant 14h jeudi.

Deux heures plus tard, le maire annonçait la «bonne nouvelle», c'est-à-dire l'autorisation d'éponger la dette de 37 millions et d'offrir une garantie bancaire de 71 millions pour l'exportation des BIXI à l'étranger. Ce plan de sauvetage sera présenté au conseil municipal lundi.

Les BIXI sont exploités par un organisme à but non lucratif, la Société de vélo en libre-service (SVLS). Le directeur des finances de la Ville, Robert Lamontagne, siège à son conseil d'administration.

La SVLS traîne une dette de 37 millions de dollars envers la société en commandite Stationnement de Montréal, qu'elle devait payer au plus tard le 30 avril. Stationnement de Montréal avait accepté de retarder le paiement de la dette de quelques jours, mais le crédit se tarissait. Neuf employés de BIXI avaient été mis à pied.

«BIXI (la SVLS) était prêt à mettre les clés sous la porte jeudi à 14h», a dit Michael Applebaum, le président du comité exécutif, au cours d'un entretien avec La Presse, vendredi.

«Nous, on a dit: jamais, jamais, jamais. On a travaillé très fort avec le Ministère. Ils (les dirigeants de la SVLS) m'ont dit: «M. Applebaum, si on n'a pas une lettre pour le financement de BIXI à 14h, tout le conseil d'administration va démissionner. On va ramasser les bicyks et les équipements.»

«Je leur ai dit: «Si vous faites ça, là, tout de suite, tout le monde va prendre les bicyks et partir avec. C'est très important de sécuriser tous les équipements».

«On a expliqué ça au Ministère, a poursuivi M. Applebaum. Et le Ministère a accepté le financement. On va expliquer lundi soir (à l'assemblée du conseil) comment ça va être financé. Tout va être mis en place pour s'assurer que le financement de la Ville de Montréal soit sécurisé.»

La porte-parole du ministère, Caroline Saint-Pierre, n'a pas voulu commenter le dossier, et dire comment la menace de retrait des BIXI avait été perçue. Le responsable des communications de la SLVS, Michel Philibert, a lui aussi refusé de faire des commentaires.

Rapport du vérificateur

Le Ministère a rejeté le plan de financement initial soumis par la Ville. Après les négociations, il a accepté un deuxième plan. Il a exigé notamment que la Ville exerce un meilleur contrôle sur la SLVS et suive les recommandations contenues dans le rapport du vérificateur général de la Ville, Jacques Bergeron.

Or, l'enquête du vérificateur sur les BIXI, ainsi que ses recommandations, ne seront pas déposées au conseil municipal, lundi soir, mais seulement en juin. Les conseillers seront donc invités à appuyer le plan de sauvetage des BIXI sans connaître tous les faits.

Les deux partis d'opposition ont réagi vivement, vendredi, au fait que la Ville éponge une dette de 37 millions pour sauver les BIXI.

La chef de Vision Montréal, Louise Harel, a rappelé que le budget de Montréal pour 2011 fait apparaître un manque à gagner de 81 millions de dollars. «Des services sont réduits, les taxes augmentent, mais des fonds sont injectés à perte dans un organisme, la SLVS, qui n'est pas soumis à la Loi sur l'accès à l'information», a-t-elle dit.

«Le mirage de la profitabilité des BIXI doit cesser, a déclaré Richard Bergeron, chef de Projet Montréal. Les opérations des BIXI sont déficitaires année après année. Il est temps de mettre de l'ordre là-dedans.»