Dure semaine pour les avocats de la Ville de Montréal. Coup sur coup, la Cour d'appel vient de rendre deux décisions défavorables, dont l'une entraîne un débours de 3 millions de dollars. Dans cette cause - un dossier d'expropriation dont les faits remontent jusqu'en 1992 -, la justice a estimé qu'il était «grand temps que se termine cette affaire et que les expropriés touchent leur dû».

Elle ordonne à la Ville de verser à l'entreprise 150 460 Canada et à ses 11 actionnaires une somme due depuis 2002, avec intérêts. Cette dispute se trouvait en fait dans la corbeille de la mariée lors de la fusion de Saint-Laurent et Montréal, cette année-là. Il s'agit d'un débat essentiellement technique. L'entreprise a été expropriée de plusieurs de ses immeubles entre 1992 et 1998 pour créer le Technoparc de Saint-Laurent, qui a payé chaque fois une «indemnité provisionnelle», sorte d'avance en attendant le règlement définitif. Les sommes en cause ne sont pas précisées dans le jugement.

Tout le débat depuis porte sur les sommes payées: doivent-elles être affectées au capital ou aux intérêts?

Cette question complexe et théorique vient de coûter 3 millions de dollars aux contribuables montréalais. C'est essentiellement la différence entre les deux thèses, celle du capital étant défendue par Montréal. La Ville a perdu en Cour supérieure le 4 février 2010 et porté la cause en appel.

Dans leur décision rendue le 10 mars dernier, les trois juges de la Cour d'appel blâment quelque peu la Ville. Ils estiment qu'elle cherche «midi à quatorze heures», qualifient sa position d'illogique et appellent à régler «cette saga qui s'étire sur près de 20 ans».

Des bornes dangereuses

L'autre décision, rendue publique le 8 mars dernier, porte sur un litige entre Montréal et un entrepreneur en déneigement, C.M.S. Entrepreneurs généraux. Le 6 février 2004, un employé de cette entreprise a arraché une borne d'incendie ensevelie sous la neige. «L'eau, qui en jaillit, envahit deux immeubles limitrophes causant des dommages aux immeubles et aux biens des entreprises qui y logeaient», explique le jugement.

La question: qui est responsable? Ou, plutôt, puisque tout est affaire de nuances, dans quelle proportion la Ville et C.M.S. sont-elles responsables des dégâts?

Le 24 avril 2009, la Cour supérieure tranche: seule la Ville est responsable. Essentiellement, on a établi que le déneigement des abords des bornes d'incendie, dès que les précipitations de neige dépassent 15 cm, devenait un véritable «piège» pour les entrepreneurs. Ceux-ci ne voient plus les bornes d'incendie et les emboutissent régulièrement. Les trois juges de la Cour d'appel ont confirmé la décision et ordonné à la Ville de payer près de 200 000$ aux assureurs de l'entreprise.

À la Ville, on précise que le Service des affaires juridiques étudie actuellement ces dossiers. «Nous attendrons leur recommandation avant de faire quelque commentaire que ce soit», a déclaré le porte-parole Gonzalo Nunez.