Emplois «pour les amis du parti», «traitements de faveur» et copinage «scandaleux». Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a accusé hier la formation du maire Gérald Tremblay de népotisme à mots à peine voilés.

Selon le chef de la deuxième opposition, neuf anciens candidats ou proches du parti au pouvoir ont trouvé dans l'appareil municipal des emplois qui leur ont rapporté 1,2 million de dollars en 2010. Union Montréal ne nie pas les faits, mais estime qu'il s'agit d'une situation normale, qui était connue et dont se sert Richard Bergeron pour obtenir de la visibilité médiatique.

Cette visibilité médiatique, Projet Montréal s'est assuré de l'obtenir, hier: en début de journée, le parti a envoyé un communiqué qui promettait des révélations «sur les amis du régime Tremblay» et a annoncé sur sa page Twitter: «Conférence de presse dans 25 minutes... Ça va fesser!»

Quelles sont ces révélations au juste? André Lavallée, Michel Labrecque, François Purcell, Diane Lemieux, Robert Pilon, Christian Ouellet, Nicole Boudreau, Nicole McNeil et Carl Bernier-Genest, tous d'anciens candidats ou proches collaborateurs d'Union Montréal, ont obtenu des revenus de plus de 1,2 million de dollars en 2010 de la part de la Ville et de ses organismes.

Le fait que ces personnes aient un emploi gravitant autour de l'appareil municipal était connu. Projet Montréal a toutefois fait une demande d'accès à l'information pour connaître leurs salaires. Fait inusité, sur lequel a beaucoup insisté Richard Bergeron, des candidats d'Union Montréal défaits ont empoché plus d'argent en 2010 que les candidats de l'opposition qui les ont battus...

»Amis du régime»

Projet Montréal a produit un «top 20 des amis du régime», classés en fonction de leur salaire. Au premier rang - «champion toutes catégories», a raillé M. Bergeron - se trouve André Lavallée. L'ancien maire de l'arrondissement de Rosemont est aujourd'hui chef de cabinet dans Ville-Marie. Il aurait empoché 220 386$ en 2010. Celui qui l'a battu, François Croteau, de Vision Montréal, a gagné l'équivalent de 116 185$ l'année dernière. Cette situation a fait dire à M. Bergeron qu'il est «plus payant de perdre ses élections que de les gagner à Union Montréal».

Ce cas de figure s'est répété à Ahuntsic, où le candidat d'Union Montréal, François Purcell, a été battu. Devenu «responsable du soutien aux élus» à l'hôtel de ville, il a gagné 150 996$ en 2010 «pour se promener les mains dans les poches dans les corridors», selon M. Bergeron. Celui qui l'a battu, le maire d'arrondissement Pierre Gagnier, a quant à lui empoché 102 688$. Richard Bergeron a rappelé que M. Purcell avait quitté Vision Montréal avant les élections de novembre 2009 pour se joindre à la formation du maire Tremblay. «C'est un transfuge de grande valeur et le parti devait le récompenser.»

Dans le Plateau-Mont-Royal, le maire Luc Ferrandez a aussi un salaire moindre que celui qu'il a battu. Michel Labrecque, candidat malheureux pour Union Montréal, est aujourd'hui président de la Société de transport de Montréal et a gagné 186 659$ en 2010.

Pour parvenir à ces sommes, Projet Montréal a additionné à leur salaire de base les allocations de départ et de transition des candidats défaits. Ces allocations sont versées aux élus municipaux lorsqu'ils sont battus, pour les aider financièrement alors qu'ils doivent se trouver un emploi. Ainsi, le salaire d'André Lavallée a été de 112 200$, mais il a reçu une allocation de transition de 89 169$ et une allocation de départ de 19 018$. Michel Labrecque, à la STM, a un salaire de 122 196$, mais il a reçu des allocations d'environ 65 000$.

Ces allocations ne seront plus versées en 2011. Les anciens candidats et employés d'Union Montréal retrouveront donc un salaire qui ressemble à celui des élus. Peu importe, Projet Montréal estime que ces allocations doivent être repensées. «L'allocation de transition doit ressembler à l'assurance emploi, a expliqué M. Bergeron. Si tu trouves un job, tu ne la touches pas.» Projet Montréal va donc tenter dans les prochains mois de changer la nature de ces allocations.

Richard Bergeron a par ailleurs admis que la plupart des partis politiques trouvent des emplois à leurs candidats défaits. Son propre parti l'a fait pour deux d'entre eux. «Mais ils font 50 000$ par année, pas 200 000$», a-t-il dit.

Bernard Larin, porte-parole du comité exécutif, a accusé Richard Bergeron «d'entretenir les préjugés défavorables à l'endroit des élus. Le calcul de Projet Montréal induit la population en erreur parce que ça donne l'impression que les gens visés par leur dénonciation n'ont pas travaillé. Est-ce que ça veut dire que quelqu'un qui a été candidat ne peut plus gagner sa vie?»

M. Larin a aussi exhorté les élus de Projet Montréal, s'ils sont conséquents, à renoncer à leur future allocation de transition.