À Montréal aussi, les expatriés français sont touchés par le recul de l'âge minimal de départ à la retraite de 60 à 62 ans.

La réforme des retraites, Élisabeth* en voit l'effet immédiat. Professeure dans un établissement français de Montréal, affiliée à l'Éducation nationale, ministère de l'Éducation français, elle doit fêter ses 60 ans le 11 juillet prochain.

Avec la réforme des retraites, qui débute en 2011 pour les personnes nées après le 1er juillet 1951, elle ne partira plus en juillet pour sa retraite comme ça aurait été le cas avant la réforme, mais quatre mois plus tard.

«Ça, déjà, c'est difficile à avaler parce qu'on ne choisit pas notre date de naissance», dit-elle. Au gré des réformes, elle a déjà vu sa retraite diminuer financièrement (avec l'allongement de la durée des cotisations) avant de la voir s'éloigner. «Toutes ces lois qui s'ajoutent nous font travailler plus longtemps avec des retraites amoindries», constate-t-elle.

Parmi les professeurs français de Montréal qui travaillent encore pour l'Éducation nationale, l'heure est aux questions. «Il y a un sentiment d'injustice et d'inquiétude. Qui peut tenir 42, 43 ou 44 ans (au travail)? demande-t-elle. Si on veut une retraite décente, il va falloir travailler jusqu'à 65 ou 67 ans. Dans d'autres pays, les gens ont le choix.»

De plus, la rapidité de la réforme soulève de nombreuses inconnues, indique-t-elle. «On ne sait rien du tout. Toute l'administration est dans le flou, ce qui ajoute à une impression de précipitation.»

En France comme à Montréal, les opposants de la réforme gardent espoir de voir le gouvernement reculer ou, au moins, assouplir la réforme. Alors que deux nouvelles journées de mobilisation sont prévues en France, les expatriés se réuniront de nouveau demain devant le consulat de France, à Montréal.

«Ce n'est pas parce qu'on est au Québec qu'on n'est pas touchés», rappelle Franck Scemama, élu à l'Assemblée des Français de l'étranger et représentant du Parti socialiste à Montréal. Les Français installés ici et qui ont déjà cotisé à la retraite en France devront eux aussi travailler plus longtemps.

La semaine dernière, 10 Français de Montréal ont répondu à l'invitation, ce qui n'a pas empêché la manifestation de trouver un certain écho dans les médias de l'Hexagone. Cette semaine, Franck Scemama espère doubler les effectifs: les Français de Montréal, échaudés par les mesures de Nicolas Sarkozy, sont, selon lui, plus enclins à manifester en ce moment. «Il y a une accumulation de frustrations. La politique sur les Roms, par exemple, a beaucoup choqué les Français d'ici qui savent ce que c'est qu'être immigré», dit-il.

Au-delà de son propre exemple, Élisabeth regarde, non sans mal, le système des retraites partir à vau-l'eau. «À la limite, mon cas n'est pas pire, comme disent les Québécois. Ma retraite, je l'aurai quand même. Mais c'est une réforme injuste, précipitée et je m'inquiète pour les jeunes», dit-elle.

* Pour des raisons de confidentialité, nous avons accepté de changer le nom de cette personne.