Pour mettre fin à un embarrassant feuilleton qui dure depuis quatre ans, le gouvernement Charest va plaider l'urgence et permettre à la STM de conclure un contrat de gré à gré avec Bombardier-Alstom pour le contrat de 3,4 milliards de dollars visant le remplacement des wagons du métro de Montréal.

Selon ce qu'a appris La Presse, Transports Québec a officiellement demandé mercredi à la Société de transport de Montréal de reporter d'une semaine l'appel d'offres international qu'elle devait publier aujourd'hui. La demande, discutée mardi au comité des priorités du gouvernement, a été avalisée hier au Conseil des ministres. Une source à la STM a indiqué que l'organisme allait obtempérer.

Pendant ce délai d'une semaine, Transports Québec pourra négocier le contrat de gré à gré avec le consortium Bombardier-Alstom. Il faudra 1053 voitures pour remplacer le parc actuel, dont une partie remonte à l'inauguration du métro, en 1967.

Les discussions déjà amorcées vont bon train, et on espère parvenir à une entente sur le prix. Bombardier-Alstom demandait passablement plus cher que pour les voitures du métro de Toronto, fournies par Bombardier.

Loi d'exception

Pour bien arrimer cette décision avec la réglementation en place, le gouvernement Charest est prêt à recourir à une loi d'exception, qui serait déposée à l'Assemblée nationale au milieu de la semaine prochaine, selon des sources municipales. Pour justifier cette démarche inusitée, Québec entend plaider que, après quatre ans de dédales juridiques, le temps presse. Les achats de la STM ne sont pas couverts par les règles de l'Organisation mondiale du commerce, explique-t-on. Au surplus, le gouvernement a le droit de plaider l'urgence pour passer outre au processus d'appel d'offres international.

On prévoit aussi que les délais supplémentaires de 18 à 24 mois qu'entraînerait un appel d'offres international risquent de faire grimper en flèche les coûts d'entretien des voitures du métro, qui ont atteint - et parfois largement dépassé - leur durée de vie utile.

C'est d'ailleurs ce qu'avait plaidé le porte-parole du PQ en matière de Transports, Stéphane Bergeron, lors du dernier dérapage du dossier, au début de l'été.

La STM avait alors décidé de relancer un appel d'offres international après les représentations de la firme espagnole CAF. Ironiquement, dès le début du feuilleton, Québec avait décrété que la STM pouvait négocier directement avec Bombardier. Par la suite, on avait inclus Alstom, qui menaçait de recourir aux tribunaux.

La décision de Québec vise aussi des objectifs électoraux. Jean Charest devra déclencher une élection complémentaire pour remplacer Claude Béchard dans Kamouraska-Témiscouata, où se trouve l'usine de Bombardier de La Pocatière, dont les carnets de commandes sont bien minces actuellement. Des centaines d'emplois sont en jeu dans cette région autrement défavorisée.

Bombardier faisait depuis des semaines un intense lobbyisme en ce sens auprès de Québec. Le ministre des Transports, Sam Hamad, était semble-t-il réticent à cette avenue à cause des conséquences sur les échange internationaux. La décision est délicate aussi pour le premier ministre Charest, qui s'est toujours fait l'apôtre d'un traité de libre-échange entre le Canada et l'Europe.

Mais les considérations économiques l'ont emporté. Le gouvernement s'inquiète du manque de tonus de l'économie américaine - avec ses exportations, le Québec est extrêmement dépendant de ce qui se passe chez nos voisins du Sud.