Revoir la priorité accordée aux gangs de rue et la mission du groupe antigang Éclipse, réduire l'état-major, encadrer le double emploi dans la haute direction; le nouveau chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Marc Parent, compte déjà rompre avec plusieurs politiques de son prédécesseur, Yvan Delorme.

Il était à peine 8h, mais Marc Parent semblait déjà bien éveillé lorsqu'il a reçu La Presse, jeudi, dans son bureau du quartier général de la rue Saint-Urbain. Quelques boîtes jonchaient le sol, signe d'un déménagement récent.

Au terme d'une semaine consacrée à ses troupes, le nouveau directeur a rencontré les médias jeudi pour expliquer sa vision et les orientations qu'il compte donner au SPVM. Force est de constater que la police est appelée à changer.

D'abord, les gangs de rue ne seront plus la priorité principale du SPVM, contrairement à ce qu'avait réitéré la direction sortante l'hiver dernier. Ce sera une priorité parmi d'autres, a déclaré Marc Parent.

«Le phénomène existe encore et il faut quand même s'y attarder, a souligné M. Parent, rappelant que les gangs de rue ont été responsables de 1,6% des crimes en 2009. Il faut surtout regarder ce qui est plus occulte dans les gangs, comme le proxénétisme et le trafic de stupéfiants.»

Marc Parent a souligné l'importance de s'attaquer également au crime organisé, aux criminalités émergentes, mais aussi à la violence familiale, qui représente une grande part de la criminalité à Montréal.

Éclipse changera

Du même souffle, le nouveau directeur entend redéfinir la mission du groupe Éclipse, créé en juin 2008 pour lutter contre les gangs de rue. Cette escouade mobile a été critiquée au lendemain de l'émeute de Montréal-Nord, en août 2008. Plusieurs voix ont déploré la hausse fulgurante des contrôles d'identité injustifiés dans les quartiers chauds de la métropole.

«La vision d'Éclipse et le mandat qu'on lui a donné nous ont mis dans une drôle de position, a convenu Marc Parent, d'une voix calme et posée. En ayant une approche très large comme ça, où on intervient de façon très répressive, c'est sûr qu'on va augmenter le niveau de tension avec certains jeunes. Ça peut mener à du profilage racial ou en donner l'impression.»

Marc Parent souhaite donc confier un mandat d'enquête plus spécifique à l'escouade. «Éclipse a développé une connaissance pointue de certains groupes très criminalisés, a-t-il souligné. Ses membres ont une expertise auprès des criminels de 40-45 ans, que l'on appelle encore gangs de rue, mais qui font du crime organisé de haut niveau.»

Direction épurée

Afin de «s'ajuster rapidement» aux nouveaux visages de la criminalité montréalaise, Marc Parent a allégé la structure de l'organisation: deux des trois directions ont été abolies pour ne garder que la direction des opérations. Le comité de direction, qui comptait 18 personnes, n'en compte plus que 11.

Ce remaniement permettra progressivement d'ajouter une quarantaine d'agents sur le terrain, selon M. Parent. Une décision qui est donc bien accueillie par les troupes. «Ça nous permettra d'être plus efficaces et de mieux soutenir les policiers dans leurs opérations», a-t-il dit.

Par ailleurs, le chef entend limiter le double emploi au sein de la haute direction. Rappelons que, le printemps dernier, La Presse a révélé que l'ex-numéro 3 de la police, Mario Gisondi, dirigeait une entreprise de construction. «Dans les hautes sphères de notre organisation, toute notre énergie devrait être dédiée à notre travail, a-t-il dit. C'est sûr que, là-dessus, je vais avoir des discussions avec mon état-major.»