Après les éoliennes, voici les hydroliennes. Québec espère mettre sur pied une nouvelle filière industrielle de production d'énergie propre et renouvelable grâce à ces turbines sous-marines.

Les gouvernements provincial et fédéral ont annoncé mardi leur soutien à la firme montréalaise RSW, laquelle a mis au point un prototype de turbines hydroliennes qui seront installées dans le fleuve Saint-Laurent, à proximité de la Cité du Havre, à Montréal, d'ici à la fin du mois d'octobre. L'objectif : démontrer que l'on peut produire une électricité propre et non polluante grâce à l'énergie des rivières.

«C'est une première dans le domaine des énergies renouvelables», dit Nathalie Normandeau, vice-première ministre du Québec et ministre des Ressources naturelles. Le gouvernement du Québec a contribué à la mise au point du prototype avec une subvention de 3 millions de dollars, et Ottawa a alloué 2,8 millions.

«On prévoit que cela générera de l'électricité renouvelable à un coût inférieur à celui des méthodes actuelles de production d'énergie renouvelable et de l'hydroélectricité. Cette technologie peut être utilisée pour générer de l'électricité dans les régions éloignées», croit quant à lui Christian Paradis, ministre des Ressources naturelles du Canada.

Ces deux turbines produiront 250 kilowatts chacune. Si la technologie se révèle viable, les hydroliennes pourraient produire jusqu'à 10 000 mégawatts pour l'ensemble du Canada, selon M. Paradis. Au Québec, on pourrait produire 1000 mégawatts. Le coût du kilowatt devrait être comparable à celui de l'énergie éolienne.

RSW étudie jusqu'en 2011 la faisabilité de ce projet à grande échelle avant de se lancer dans la mise en marché. Mais le gouvernement du Québec ne cache pas son enthousiasme face aux possibilités de cette technologie définie comme «100 % québécoise», qui a déjà créé 30 emplois directs et qui pourrait s'exporter au Canada et à l'étranger.

«La technologie de RSW est prometteuse et fait partie d'une filière que l'on veut voir naître au Québec. C'est une façon concrète de diversifier notre portefeuille énergétique, dit la ministre Nathalie Normandeau. On y croit. On a fait le choix de l'économie verte et on passe de la parole aux actes.»

Ce n'est pas la première fois que la firme RSW s'intéresse au fleuve Saint-Laurent à la hauteur de la Cité du Havre, à Montréal. En 2003, la firme avait étudié, à la demande d'Hydro-Québec, la possibilité d'y bâtir une centrale au fil de l'eau. Le projet avait finalement été abandonné, mais il a donné naissance à l'idée des hydroliennes.

Le projet de barrage avait alerté la fondation Rivières, qui craignait l'effet qu'il pouvait avoir sur l'écosystème du fleuve. Les hydroliennes ont toutefois été conçues en tenant compte de la présence d'espèces de poissons menacées, dit Georges Dick, président de RSW.

«On a eu des discussions avec Environnement Québec et Environnement Canada ; pour le moment, il n'y a pas lieu d'avoir des inquiétudes», précise M. Dick. Des caméras sonores seront installées sur les prototypes afin de surveiller le comportement des poissons, dit-il.

Réal Reid, ingénieur spécialiste en énergie éolienne et membre du conseil d'administration de la fondation Rivières, se montre plus circonspect. «C'est une technologie embryonnaire, on n'en connaît pas encore les impacts environnementaux, dit-il. On ne peut pas dire que ce sera néfaste ou bénéfique, mais ce n'est pas parce que c'est sous l'eau que cela n'a pas d'effet.»

Québec comme Ottawa veulent croire au potentiel économique et énergétique des hydroliennes. «Il y a un rendez-vous extraordinaire que le Québec ne peut pas manquer», croit Nathalie Normandeau, qui n'exclut pas non plus de créer des filières vertes pour le secteur forestier ou celui des biocarburants.