Il a fallu quelques minutes à peine pour que le boulevard Saint-Laurent soit envahi par la clameur des supporteurs de la Furia Roja à l'issue du match Espagne-Pays-Bas. Près de deux heures après le début de la finale de la Coupe du monde, les Espagnols ont marqué le premier but de la rencontre et décroché le titre de champions du monde.

Vuvuzelas, hurlements et klaxons ont résonné sur le boulevard Saint-Laurent près de la sortie du Club espagnol, où s'étaient entassés fans et curieux pour ce match décisif dimanche après-midi. José, Madrilène expatrié à Montréal depuis huit ans, semblait au bord des larmes après un suspense qui a duré 116 minutes. «Je suis très content», a-t-il dit, ému.

Au milieu du boulevard, quelques jeunes femmes court-vêtues agitaient frénétiquement des drapeaux jaune et rouge. Arborant le t-shirt de l'Espagne, Arseno Diaz s'élançait vers les voitures, drapeau à la main, défiant les conducteurs, hilare, tel le toréador face au taureau. «Ça, c'est la touche espagnole», a-t-il dit en riant avant de s'élancer, torse bombé, vers un autobus.

Voitures et supporteurs ont remonté le boulevard Saint-Laurent, au son des chants et des klaxons. «Enfin on a du respect! L'Euro, c'est bien, mais c'est pas la Coupe du monde», s'est exclamé Francisco Javier Moreno, Montréalais d'origine espagnole.

Gerardo Collo est Vénézuélien, mais c'est le visage peint en jaune et rouge qu'il a assisté au match décisif du Mondial 2010. «Ça arrive juste une fois dans la vie! L'Espagne fait très bien et ça a été un très bon match», a-t-il jugé.

La liesse qui s'est emparée des spectateurs montréalais offrait un contraste étonnant avec le sérieux affiché au cours d'un match qui a ménagé le suspense jusqu'aux dernières minutes de la prolongation. «Les matchs du Brésil, il y a la batucada et tout, ici, il y a moins d'ambiance. Ça doit être le stress», a dit Kevin, un Français installé à Montréal.

La tension a grimpé d'un cran lors de la prolongation. Scandant «España, España», le public du Club espagnol a copieusement hué les fautes des joueurs de l'équipe des «Oranje» quelques minutes avant l'issue du match. «Les Néerlandais ont joué salement, et on a vraiment bien fait de gagner», s'est félicité Adrien Triana.

Non loin de là, l'explosion de joie des partisans de l'Espagne n'a pas attristé Philippe Émond, Montréalais converti à l'équipe néerlandaise lors d'un récent voyage à Amsterdam. «Je suis content pour eux», a-t-il dit, bon joueur. Rares étaient les t-shirts orange dans ce coin de Montréal, mais le jeune homme n'a pas été importuné lors du match: «Dans les bars espagnols, les gens ne sont pas baveux», a-t-il remarqué.

Alan Castro, supporteur du Chili passé lui aussi du côté des Oranje, a eu la chance d'aller appuyer son équipe en Afrique du Sud. Malgré tout, le jeune homme aime la façon qu'ont les Montréalais d'encourager une multitude d'équipes. «Ici, nous sommes beaucoup d'immigrants. Il y a de tout, alors ça rassemble toutes les nations même si tout le monde se considère comme québécois.»