Pour la troisième fois depuis que le Quartier des spectacles est sur les rails, l'administration Tremblay-Dauphin s'apprête à concéder l'exploitation d'un terrain du centre-ville à la Société de développement Angus (SDA). Par le biais d'une vente de gré à gré.

À moins d'un revirement de dernière minute, les élus seront appelés à approuver l'achat de l'édicule du métro Saint-Laurent, mercredi prochain pendant une séance à huis clos du comité exécutif, pour une somme non déterminée, variant de 1,6 à 4,3 millions, selon «les volontés de développement culturel de l'acquéreur», a appris La Presse.

 

Dans l'état actuel des choses, le terrain est évalué à 2,9 millions. Mais une évaluation qui tient compte du coefficient d'occupation du terrain dans un secteur d'exception, à savoir le Quartier des spectacles, dont fait état la «direction de la gestion du portefeuille et des transactions» à la Ville, établit sa valeur marchande à 4,3 millions. Soit deux fois plus que le prix de base demandé à Angus.

Le projet de transaction immobilière, dont La Presse a obtenu copie, stipule par ailleurs qu'il est impératif que la «promesse d'achat» soit adoptée au conseil municipal du 21 septembre. Sans quoi la SDA ne pourra pas «engager les fonds nécessaires pour poursuivre le développement» et respecter ses engagements envers des occupants «culturels» intéressés, et non confirmés, dont l'école de danse contemporaine (LADMMI). Aucune institution ne s'est encore engagée formellement.

Du même souffle, dans le dossier à être soumis à la garde rapprochée du maire Gérald Tremblay, et appuyé par le contentieux, la haute direction de Montréal met en garde les élus. «Cette transaction laisse libre choix au promoteur de densifier ou non, ce qui pourra avoir comme répercussion un manque à gagner important sur le prix payé de même que sur les retombées fiscales», peut-on lire (il s'agit d'un manque à gagner initial de 2,5 millions et annuellement de 630 000$).

Plus loin, le contentieux note «qu'à compter du moment où la Ville accordera mainlevée sur les clauses de la vente, la pérennité de la vocation culturelle de l'immeuble ne sera plus garantie que par des recours personnels». Ce qui signifie qu'une fois la transaction conclue, la SDA ne sera pas tenue de rendre des comptes à la Ville de Montréal en matière de vocation culturelle.

Subvention de 1,2 million

Initialement, le projet d'exploitation de l'édicule du métro Saint-Laurent, à l'angle des boulevards Saint-Laurent et De Maisonneuve, devait être piloté par la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), dont les transactions avec le groupe immobilier Catania ont fait l'objet d'une enquête du vérificateur général de Montréal. Ce dossier est maintenant entre les mains de la Sûreté du Québec. Quelque temps laissé sur la glace, le projet de l'édicule Saint-Laurent a refait surface quand l'administration Tremblay, que présidait alors Frank Zampino, a sondé la SDA (une société à but non lucratif), dirigée par Christian Yaccarini.

En plus d'une subvention possible provenant du provincial et du fédéral, Angus a déjà reçu l'assurance de la Ville de Montréal qu'une contribution pouvant atteindre 1,2 million lui serait versée moyennant la venue d'organismes culturels professionnels dans l'immeuble, sur une superficie ne dépassant pas 4452 m2. On demande aussi à Angus de s'engager à commencer la construction dans les deux ans suivant l'acte de vente.

Au comité exécutif de la Ville, la responsable du dossier, Catherine Sévigny, a confirmé hier que les élus se pencheraient sur la vente de gré à gré mercredi prochain, afin que la vente soit approuvée au conseil municipal du 21 septembre. «Je travaille pour qu'on puisse le faire le plus rapidement possible, a ajouté Mme Sévigny. En visant le projet de la plus haute qualité possible.»

De son côté, la direction de l'arrondissement de Ville-Marie a joint une note au dossier mentionnant que le terrain «devrait être vendu à sa juste valeur marchande». Une source bien placée à l'arrondissement a par ailleurs affirmé à La Presse, sans vouloir être nommée, que si la vente est conclue selon les conditions actuelles, il s'agira d'une «transaction bâclée». Pour un projet qui est toutefois salué dans le Quartier des spectacles.

Loi sur les cités et villes

Article 28, régissant les ventes de terrains d'une municipalité «Sauf disposition contraire, l'aliénation de tout bien de toute municipalité doit être réalisée à titre «onéreux». Les Villes ne sont pas tenues de procéder par appel d'offres, mais le greffier doit publier mensuellement un avis portant sur les biens d'une valeur supérieure à 10 000$ qui ont été aliénés par la municipalité autrement que par enchère ou soumission publique. L'avis doit décrire chaque bien et indiquer, en regard de chacun, le prix de l'aliénation ainsi que l'identité de l'acquéreur.»

Source: ministère des Affaires municipales