Arrivé en politique en 2005, le conseiller municipal du Plateau-Mont-Royal Michel Labrecque pourrait annoncer son départ de la politique d'ici la fin du mois, a appris La Presse. En faisant le bilan de son mandat, celui qui est aussi le président de la Société de transport de Montréal depuis le début de l'année, pointe les problèmes de gouvernance au sein de son arrondissement.

«Tu peux travailler pendant 27 ans dans certains domaines, tu réalises des choses, on te dit bravo! Le jour où tu es élu, tu as un nez de clown au milieu du nez, enfin pas un nez de clown, mais vous voyez ce que je veux dire...»

 

Michel Labrecque est un passionné et un actif. Il a réalisé son Plan de déplacement urbain pour améliorer la qualité de vie des citoyens. Mais pour un résultat, bien des désillusions. Toujours réclamer de l'argent à la ville centre. Entendre les bruits des scandales de l'hôtel de ville. Voir partir la conseillère Josée Duplessis pour Projet Montréal. Apprendre que la mairesse Helen Fotopulos se divertit avec un important fournisseur de la Ville. Et vivre les problèmes de gouvernance du Plateau-Mont-Royal.

Cet arrondissement vit une crise depuis 2006. Cette année-là, Josée Duplessis a rencontré à plusieurs reprises le directeur de cabinet du maire Tremblay, Stéphane Forget, pour lui dire «que ça ne fonctionne pas dans l'arrondissement». Ces rencontres n'ont rien donné. Une réflexion a débuté avec les conseillers Michel Labrecque, Isabel Dos Santos et Eleni Fakotakis.

«On a alors dit à Helen Fotopulos qu'il y a une dynamique de gouvernance, qu'on était de nouveaux élus et que la dotation du Plateau était insuffisante», dit Michel Labrecque. Josée Duplessis disait qu'il y avait aussi un manque de collégialité. «Ce n'est pas ça, souligne M. Labrecque. Quand on est une équipe, il y a du travail à faire pour que les objectifs communs soient partagés. On l'a dit à Mme Fotopulos. Que c'était une difficulté qu'on éprouvait. Elle en était consciente.»

Selon Josée Duplessis, au sein du caucus, le vrai maire n'est pas Mme Fotopulos mais son directeur de cabinet, Richard Côté. «Du coup, on devait faire des pré-caucus entre nous, explique-t-elle. Souvent, Helen ne nous invitait pas à des rencontres avec des fonctionnaires en nous disant «si je vous invite, je vais devoir aussi inviter Richard Bergeron».»

Au printemps 2008, Gérald Tremblay a convoqué Mme Duplessis. Il voulait savoir comment la situation évoluait et si elle allait se représenter. «J'ai dit que dans ces conditions, ce ne serait pas possible. Il était consterné d'entendre qu'il y avait si peu de collaboration dans le Plateau.»

Par la suite, les quatre élus ont rencontré Stéphane Forget pour redire la même chose. Puis en décembre dernier, Michel Labrecque, Isabel Dos Santos et Josée Duplessis ont rencontré le maire Tremblay. «Helen était au courant qu'on allait voir le maire sur la gestion et la gouvernance en général», indique M. Labrecque. Josée Duplessis a demandé au maire Tremblay qu'il choisisse Michel Labrecque à titre de futur candidat d'Union Montréal à la mairie du Plateau.

«On lui a dit qu'on avait une proposition, soit de reprendre la gouvernance du Plateau, de changer les employés, notamment les attachés de la mairesse qui la surprotègent, raconte Mme Duplessis. Le maire a répondu «bon, j'embarque avec vous», mais après, il n'a jamais répondu. Michel était hors de lui. Il travaillait jour et nuit à la STM. Il est allé rencontrer le maire le lundi avant ma démission. Et le jeudi, il nous a dit que le maire avait dit non, qu'il avait finalement décidé de choisir Helen, mais qu'il nous aimait tous.»

Michel Labrecque n'a pas la même version. Il n'a «jamais voulu la tête» d'Helen Fotopulos. Mais il voulait que ça fonctionne. Tout simplement. Afin que ça avance. Quoi qu'il en soit, il ne briguera pas la mairie du Plateau, ni avec Union Montréal, ni avec un autre parti. Et s'il quitte son poste de conseiller, il devra également abandonner à regret ses fonctions de président de la STM.

«À 50 ans, je me considère vieux. Je vois le temps filer. Il me reste peut-être 15 ans de travail. L'action citoyenne m'intéresse. Je veux construire quelque chose, inaugurer quelque chose. Je me pose la question. Ai-je le goût encore? Et si je remballe, c'est pour quoi?»

La mairesse Fotopulos reconnaît qu'il y a eu «des malaises». «Depuis le début, on avait des discussions assez fortes, indique-t-elle. Sur la dotation, j'en conviens, ce n'est pas assez. Mais on était à 47 millions et on est presque à 56 millions.»

Elle estime que son bilan est «bon» et qu'elle est «allée au bat» pour obtenir des choses de la ville centre. «Peut-être que j'ai été trop collégiale, dit-elle. Je ne suis pas une dictatrice. Je travaille pour ma ville et mon arrondissement. Si M. Labrecque quitte la politique, c'est sa décision. Je veux qu'il reste, car il a beaucoup de talent. Il a un rôle important à Montréal. Est-ce que c'est à la mairie, par contre? Je serai honorée de faire équipe avec lui.»