Comme cela se fait à Vancouver depuis 15 ans, Montréal est ouvert à la possibilité de forcer les commerçants, les entrepreneurs et les propriétaires de résidences à nettoyer les graffitis, a appris La Presse.

À Vancouver, la municipalité a adopté en 1994 un règlement draconien pour lutter contre les graffitis: il est basé sur la responsabilisation des citoyens, particuliers et corporatifs. Il les oblige à faire enlever le graffiti dans les 10 jours suivant un avis remis par la Direction des permis et inspections de Vancouver. Si ce n'est pas fait, la Ville nettoie elle-même et fait payer la facture (en moyenne 2000$) au propriétaire par le biais de son avis d'imposition.

 

Le règlement prévoit une amende minimale de 500$ pour toute personne qui fait un graffiti sur le domaine public ou privé. Comme Montréal, Vancouver a une ligne téléphonique spéciale afin que les gens puissent signaler la présence de graffitis. Ils l'ont fait 6226 fois en 2007. Après avoir conclu des ententes de partenariat avec des commerces de peinture, Vancouver distribue gratuitement des trousses de nettoyage de graffitis aux citoyens qui le demandent.

Avec des résidants, la police, des organismes communautaires, des entreprises et des écoles, la Ville a créé des «Community Paint Out», des groupes de citoyens qui nettoient ensemble des murs graffités de leur quartier après avoir obtenu l'accord du propriétaire. La Ville fournit le matériel nécessaire.

Il y a aussi un programme de murales qui permet aux graffiteurs de s'exprimer en des lieux désignés. Des citoyens peuvent offrir la possibilité, par l'entremise de ce programme, à des graffiteurs de décorer leur façade de maison ou un mur arrière. Des usines peuvent aussi faire décorer leurs bâtiments. Mais il faut que cela concerne des endroits déjà graffités et il faut que la nouvelle décoration reçoive l'accord préalable de la Ville et du quartier en ce qui a trait à son esthétisme.

Là encore, la Ville fournit la peinture et les pinceaux et organise même des compétitions des meilleures murales. Les graffiteurs sont payés par les citoyens et les entreprises une somme raisonnable.

L'effort donne des résultats. Vancouver a nettoyé environ 50 000 graffitis de ses bâtiments publics en 2003, quelque 40 000 en 2005 et un peu plus de 21 000 en 2007. Mais ça coûte cher. L'an dernier, le coût global de son programme de lutte contre les graffitis a atteint 720 000$. Fournir de la peinture aux citoyens pour nettoyer ou pour organiser des murales lui coûte environ 100 000$ par an.

Vancouver estime que sa politique lui fait économiser de l'argent, mais Grant Wolf, responsable du dossier graffiti à la Ville de Vancouver, dit qu'il faut considérer l'approche avec réalisme. «On sait qu'on ne peut pas éliminer tous les graffitis, mais on peut les contrôler, dit-il. C'est une bonne solution, mais c'est toujours à refaire. On fait notre possible.»

Pour Luis Miranda, responsable de la propreté à Montréal, cette expérience est très intéressante. Contrairement à ses prédécesseurs, il se dit très ouvert à ce genre de règlement. «J'aimerais bien savoir comment cela s'applique à Vancouver, dit-il. Ensuite, il faut regarder la valeur juridique d'un tel règlement. Mais c'est sûr que si cela permet d'enlever rapidement les graffitis, ça aiderait beaucoup.»

Responsabiliser les citoyens permettrait à la Ville de Montréal d'économiser de l'argent et de rendre la ville moins inquiétante dans certains quartiers. M. Miranda dit qu'il y a encore du laisser-aller. Il souhaite que plus de Montréalais s'engagent à enjoliver leur propriété.