Il n'y a pas que les policiers qui seront sur le qui-vive cet après-midi, lorsque des centaines de personnes manifesteront dans les rues de Montréal contre la brutalité policière. Des commerçants du Plateau-Mont-Royal aussi seront sur leurs gardes et prendront les grands moyens pour limiter la casse qu'appréhendent les autorités.

«Je vais verrouiller les portes dès que les marcheurs vont arriver dans les environs», affirme Suhai Kam, propriétaire d'un petit dépanneur situé juste à côté du local de la Fraternité des policiers de Montréal, devant lequel les manifestants ont promis de s'arrêter en début d'après-midi. Au cours des derniers jours, des agents ont fait savoir aux commerçants des environs qu'ils anticipaient des débordements. «Ils m'ont dit de me protéger et d'être prudent, alors je le ferai», dit M. Kam.

 

Une fois n'est pas coutume, Kamil Assaleh passera ainsi la journée dans sa bijouterie de l'avenue Mont-Royal, à quelques mètres à peine du point de rencontre des manifestants. «On ne sait jamais ce qui peut arriver, il suffirait d'un seul geste de provocation, d'un côté ou de l'autre, pour que ça tourne mal», lance-t-il. Comme tous les dimanches, son commerce sera fermé, mais il craint de voir ses vitrines voler en éclats. «Si je suis là, je pourrai au moins empêcher les vandales d'entrer et de tout démolir.»

François Charbonneau aussi se privera de son congé dominical pour monter la garde à la Papeterie Le Plateau. «Je vais vider mes vitrines et contrôler toutes les allées et venues», explique-t-il. Ce n'est pas tellement le vandalisme qui l'inquiète, mais le pillage. «Il y aura tellement de monde, ce serait facile pour un groupe d'entrer dans le magasin et de faire un vol massif», dit-il. Il craint que les policiers soient déjà si occupés à maîtriser la foule qu'ils ne puissent protéger les boutiques.

Plus optimistes

De l'autre côté de la rue, Antoine Salim fait montre de plus d'optimisme. Le départ de la marche dont les organisateurs n'ont pas dévoilé l'itinéraire est prévu pour 14h. «Ce n'est pas en plein jour qu'il y aura de la casse, et les manifestants seront trop fatigués à la tombée de la nuit pour faire des dégâts», dit le propriétaire de la boutique Abra-Kad-Abra.

«Un colosse est venu nous offrir ses services de gardien de sécurité, mais il ne faut pas céder à la panique... On devrait s'en tirer en verrouillant les portes», dit Marie-Pierre Coulombe, vendeuse à la boutique Érotim.

Certains espèrent même faire de meilleures affaires qu'à l'habitude, comme François Dumenil, qui tient un petit stand de gaufres à la sortie du métro. «Les gens ne vont pas s'en prendre aux marchands : c'est contre les policiers qu'ils en ont», ajoute-t-il.

La dernière marche contre la brutalité policière, en 2008, s'était soldée par l'arrestation d'une quarantaine de personnes. Compte tenu des événements survenus l'été dernier à Montréal-Nord à la suite de la mort de Fredy Villanueva, les autorités ont laissé entendre que les manifestants pourraient être plus agressifs cette année.