La ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport Michelle Courchesne, responsable de la région de Laval, n'a plus l'intention de demander au gouvernement de décréter une réserve foncière dans trois îles de la rivière des Mille-Îles.

«Ce n'est plus nécessaire, à cause du changement de zonage annoncé par Laval la semaine dernière», a-t-elle déclaré à La Presse.

Mme Courchesne et ses quatre collègues députés libéraux de Laval avaient annoncé en novembre dernier leur intention de bloquer la construction domiciliaire dans les îles aux Vaches, Saint-Pierre et Saint-Joseph par leur mise en réserve pour deux ans.

 

Cette annonce avait réjoui Marcel Bruneau, de l'organisme Sauvons nos trois grandes îles. Mais le recul de Mme Courchesne l'inquiète. «On a travaillé avec Mme Courchesne et il faudrait qu'elle nous explique où elle s'en va, dit-il. C'était un engagement électoral de faire une réserve au printemps. Et il n'y en a plus?»

La semaine dernière, la Ville de Laval a annoncé qu'elle se proposait d'annuler le règlement adopté en 2001 qui aurait permis la construction de centaines de maisons.

La décision de la Ville est survenue après une intense contestation de la part de citoyens. Ils affirmaient entre autres choses que le règlement avait été adopté illégalement.

Certains observateurs à Laval avaient prédit que les promoteurs poursuivraient le gouvernement s'il décrétait une mise en réserve. Ils avaient comparé le dossier des trois îles de Laval à celui de la mise en réserve de l'île Charron, à Boucherville, où un projet de 2500 appartements en copropriété était annoncé.

En entrevue à La Presse, Mme Courchesne a elle aussi fait un parallèle avec le dossier de l'île Charron, mais pour dire que, dans le cas de Laval, l'annulation annoncée du règlement municipal de zonage enlevait beaucoup de pression. «Là, je n'ai plus besoin de la mise en réserve, dit-elle. L'association de citoyens va poursuivre ses travaux et les cinq députés continuent de les appuyer. Il va falloir que tous les partenaires voient quelle est la suite des choses. La Ville de Laval demeure un partenaire important.»

Il faudra estimer la valeur écologique des quelque 200 hectares des trois îles, dit la ministre. On sait déjà que l'île Saint-Joseph abrite un site de ponte de la tortue géographique, une espèce vulnérable, et que l'île aux Vaches comporte l'une des plus grandes érablières d'érables noirs, une espèce rare. L'archipel est fréquenté par 235 espèces d'oiseaux, selon l'association Sauvons nos trois grandes îles.

»Ce n'est pas facile», dit un promoteur

De son côté, le promoteur Luigi Liberatore, principal propriétaire de l'île Saint-Joseph, était encore sous le choc, hier, une semaine après avoir appris que la Ville annulerait son règlement de zonage de 2001. «Ce n'est pas facile, a-t-il dit. On était de bonne foi, on a acheté quatre ans après le changement de zonage. On voulait faire quelque chose de bon et de bien. Notre projet comptait 80 maisons alors qu'on aurait pu en mettre 400.»

M. Liberatore ne sait pas s'il va entreprendre des recours judiciaires. Il va assister aux consultations de la Ville de Laval, en mars prochain. Mais il s'est plaint du climat d'affaires. «Chaque fois qu'un entrepreneur se lève pour faire quelque chose, il y a cinq personnes pour l'en empêcher», a-t-il déploré.

Là-dessus, Mme Courchesne réplique que «Laval est encore en très forte croissance». «Et il reste un fort potentiel, dit-elle. Mais on doit tenir compte de l'environnement et des espaces naturels qui tendent à se raréfier.»