La SHDM, que la Ville de Montréal avait transformée en organisme privé, redeviendra une société paramunicipale, a décidé le maire Gérald Tremblay. En attendant, Martial Fillion, directeur général de cette société qui gère 300 millions d'actifs immobiliers de la Ville, est démis de ses fonctions pour «irrégularités», selon le mot employé par le maire.

Le 10 octobre, La Presse révélait que M. Fillion était l'objet d'enquêtes par les vérificateurs internes de la SHDM, ou Société d'habitation et de développement de Montréal. Il était suspendu le jour même, avec salaire. Hier, le rapport de vérification, préparé par la firme KPMG, a été rendu public.Le rapport indique que M. Fillion a libellé des chèques de plus de 8,3 millions de dollars, sans consulter le conseil d'administration de la SHDM, au nom de Construction Frank Catania, un promoteur qui construit quelque 1800 unités d'habitations sur un vaste terrain appelé Faubourg Contrecoeur, dans l'est de Montréal.

Selon le rapport, M. Fillion a modifié des ententes antérieures de la SHDM avec Catania tout en minimisant, lors d'une présentation devant le conseil d'administration, une perte potentielle de 1,6 million de dollars, relativement à une entente avec le promoteur.

Dans une déclaration diffusée hier, le conseil d'administration de la SHDM conclut «à un manque de confiance envers le directeur général», ce qui l'amène à résilier son contrat de travail. Le maire a annoncé que M. Fillion sera remplacé par un directeur adjoint de la Ville, Guy Hébert.

Le maire entend revoir la composition du conseil d'administration de la SHDM et y nommer des élus. Il donnera «un mandat clair» de revoir la gestion administrative et nommera un comité de direction pour le projet Contrecoeur, qui reçoit un financement important de la part de la Ville et la SHDM.

Le terrain du Faubourg Contrecoeur, qui appartenait à la Ville de Montréal, avait une valeur de 31 millions de dollars au rôle d'évaluation quand la SHDM l'a vendu pour 4,4 millions à Catania, après avoir soustrait des millions de dollars pour toutes sortes de travaux à effectuer, au premier chef la décontamination.

Dès 2007, la SHDM consentait une aide financière non remboursable de 15,8 millions à Catania pour construire des infrastructures dans le Faubourg Contrecoeur. La firme KPMG affirme que cette aide a été octroyée «conformément aux exigences financières liées au développement d'habitations à caractère social et à prix abordables». La Presse a cherché en vain l'existence d'un tel programme municipal en 2007, qui aurait permis une aide financière aussi importante. Les porte-parole de la Ville et de la SHDM n'ont pas pu nous renseigner à ce sujet, hier.

Par ailleurs, le maire a effectué un virage à 180 degrés quant au statut de la SHDM. Le mois dernier, La Presse avait révélé que son administration avait contourné la Charte de la Ville de Montréal et négligé la mise en garde des services juridiques de la Ville pour transformer la SHDM et une autre société paramunicipale, la Société de développement de Montréal (SDM), en organismes privés à but non lucratif. La Ville a ensuite fusionné ces deux sociétés, toujours en violant sa propre Charte.

Devant la controverse, le maire fait marche arrière. Il n'admet pas que cette transformation ait été une erreur. Mais il «demande à la ministre des Affaires municipales d'émettre de nouvelles lettres patentes afin de transformer la SHDM en un organisme paramunicipal au sens de la Charte actuelle de la Ville de Montréal».