La Société d'habitation et de développement de Montréal ainsi que la Ville de Montréal ont consenti de très nombreux avantages à l'entrepreneur Frank Catania pour développer un vaste terrain appelé Faubourg Contrecoeur dans l'est de Montréal, selon une enquête réalisée par La Presse.

La Ville était propriétaire de ce terrain de 38 hectares, situé en bordure de la carrière Lafarge. Elle estimait qu'il valait entre 23,5 et 25 millions de dollars. En 2006, elle a mandaté la SHDM pour trouver un promoteur pour y construire 1800 logements. Cette société paramunicipale a lancé un appel d'offres public visant à retenir les services d'une entreprise apte à décontaminer le sol, à construire des infrastructures et des immeubles et à faire la mise en marché des logements.

 

On ignore qui a répondu à cet appel d'offres, la SHDM refusant de le dire. Deux entreprises se sont qualifiées, dont Construction Frank Catania et associés. La SHDM a alors produit un deuxième appel d'offres, destiné seulement à ces deux entreprises. Cet appel d'offres contenait une nouveauté: le terrain était mis en vente. Cette clause n'apparaissait pas dans le premier appel d'offres qui, lui, était public.

Le terrain a alors été évalué à 19 millions. La SHDM soustrayait 11 millions pour la décontamination. Or, une firme spécialisée avait pris la peine d'indiquer qu'il s'agissait là d'une estimation préliminaire et qu'il fallait réaliser une étude de caractérisation pour avoir une idée précise du niveau de contamination, et donc des coûts de décontamination. Cela n'a pas été fait.

La SHDM a aussi soustrait 3 millions parce qu'il fallait supposément renforcer les immeubles à cause des vibrations causées par le dynamitage dans la carrière voisine. Or, les plans prévoient que tous les immeubles seront construits en dehors des zones de vibrations problématiques. Les effets des vibrations sont qualifiés de nuls à cosmétiques. Enfin, la SHDM a soustrait une somme de 650 000$ pour un talus acoustique en bordure de la carrière.

La Ville a vendu son terrain à la SHDM pour 1,6 million et ce, devant le notaire de Catania à Brossard. Puis la SHDM a vendu le terrain à Catania pour 4,3 millions, une somme payable seulement le 30 juin 2010.

La SHDM a aussi consenti un prêt de 14,6 millions à Catania au taux de base de la Banque Scotia majoré de 1,5%, majoration que Martial Fillion, directeur général de la SHDM, a fait baisser à 0,5%.

Le contrat conclu entre la SHDM et Catania en 2007 contenait aussi cette clause: «La SHDM ou la Ville de Montréal devra consentir à Catania une aide financière non remboursable de 15,8 millions pour la réalisation du projet.» Aucun règlement municipal ne permettait à la Ville de donner autant d'argent à un promoteur pour les travaux municipaux, comme les infrastructures, sur un terrain privé. Sous la direction de Frank Zampino, alors président du comité exécutif, la Ville a modifié le règlement pour permettre une telle chose, en juin dernier. (M. Zampino a quitté son poste en juillet.)

La SHDM s'est enfin engagée à acheter les logements familiaux construits par Catania au cours de la première phase s'il ne réussit pas à les vendre, tel qu'il est prévu dans le programme Accès-Condos. «La Société s'engage à payer à l'entrepreneur, en considération de la réalisation du projet de construction résidentielle faisant l'objet des présentes, la somme de 41,1 millions, établie sur la base du coût de réalisation des travaux de l'ensemble des unités d'habitation», indique une entente.