Une Amossoise a été atteinte par au moins un projectile tiré par un policier de la Sûreté du Québec, lors d'une autre intervention qui a mal tourné dans la nuit de mercredi, en Abitibi-Témiscamingue. Ce nouvel incident porte maintenant à sept - dont quatre en une semaine - le nombre de fois que des policiers ont eu recours à leur arme de service au Québec en 2011.

Ces incidents (trois à Montréal, un à Laval, un à Terrebonne, un à Saint-Rémi et un à Amos) se sont soldés jusqu'à maintenant par la mort de trois hommes. Avant eux, Fredy Villanueva avait été la dernière personne abattue par un policier du SPVM, en août 2008.

Une situation hautement inhabituelle, qui se poursuit avec les événements survenus la nuit dernière à Amos. Des policiers de la SQ s'étaient rendus à une résidence après une plainte de bruit. À leur arrivée, une femme aurait pointé une arme à feu en leur direction. Les policiers auraient répliqué à la menace en ouvrant le feu. La femme a été atteinte d'au moins une balle au bas du corps et repose dans un état stable.

L'enquête a été transférée au Service de police de la Ville de Montréal, qui hérite de sa deuxième enquête du genre en moins de 48 heures.

Saint-Rémi

Lundi, une policière de la SQ a été blessée par balle au cours d'une fusillade qui a éclaté au village de Saint-Rémi, en Montérégie. L'agente a reçu une balle à la cuisse et le suspect impliqué, âgé de 41 ans, aurait été atteint de plusieurs projectiles. Leur vie n'est pas en danger. Des témoins disent qu'il y a eu une quinzaine de coups de feu.

L'affaire aurait commencé par un braquage de domicile. Le suspect aurait enlevé une femme et l'aurait fait monter de force dans une voiture, peut-être pour se rendre à la caisse populaire. La femme se serait échappée et aurait trouvé refuge dans la fromagerie voisine. Le suspect se serait alors mis à sa recherche. On l'aurait aperçu dans un dépanneur, puis dans un casse-croûte, avant que les policiers ne l'interpellent et que les choses tournent au vinaigre. Malgré plusieurs témoignages contradictoires, la policière n'aurait pas été désarmée par le suspect, a affirmé hier le SPVM. L'homme, bien connu des milieux policiers, possédait apparemment une arme à feu, avant de tirer sur la policière.

Terrebonne

La Sûreté du Québec enquête pour sa part sur cinq incidents impliquant des policiers qui ont eu recours à leur arme de service en 2011. Le plus récent est survenu dimanche dernier à Terrebonne. Une histoire de vol qui a mal tourné serait à l'origine de l'affaire, qui s'est soldée par la mort d'un homme de 48 ans. Dimanche, des policiers de Terrebonne ont été dépêchés dans une station-service pour épingler un voleur, qui venait apparemment de commettre un larcin.

L'individu aurait alors résisté à son arrestation, avant de grimper dans sa voiture pour foncer sur les policiers. Ces derniers ont répliqué en ouvrant le feu. Quatre détonations auraient retenti. Outre le suspect, un policier a aussi subi des blessures mineures en tentant de s'agripper au véhicule du fuyard. L'individu de 48 ans n'a pas survécu à ses blessures. Son décès a été constaté à l'hôpital Pierre-Le-Gardeur dans la nuit de lundi.

Laval

Quelques jours avant les événements de Terrebonne, des policiers de Laval avaient ouvert le feu sur un homme de 36 ans. Ce dernier, un ancien militaire, repose toujours dans un état critique.

L'homme s'était barricadé plusieurs heures dans sa maison de Laval et serait subitement sorti en fin de journée pour fondre sur les policiers en pointant une arme sur eux. Les agents avaient été appelés pour une affaire de violence conjugale.

Montréal

Les autres incidents du genre se sont déroulés au début de l'année sur le territoire du Service de police de la Ville de Montréal. D'abord le 26 janvier, lorsqu'une policière a abattu un homme, Jean-Claude Lemay, dans le quartier Rosemont. L'agente aurait senti sa vie menacée lorsque l'individu de 48 ans s'est rué vers elle avec un couteau. Il a été atteint d'au moins un projectile et sa mort a été constatée à l'hôpital.

Quelques jours plus tard, à Beaconsfield, un homme de 27 ans est tombé sous les balles d'un policier après une introduction par effraction. Un complice et lui cherchaient vraisemblablement de la drogue dans une résidence de la rue Windermere. L'un des suspects aurait tiré deux fois avec un fusil automatique à l'intérieur de la maison. Les hommes ont ensuite pris la fuite en voiture. Après une collision, ils ont continué à pied. L'homme de 27 ans, Patrick Saulnier, aurait été abattu à ce moment.

Enfin, le 16 février, un homme de 47 ans a été atteint de plusieurs projectiles au cours d'une intervention dans l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce. L'homme aurait appelé la police pour dire qu'il se sentait menacé par une voiture garée à proximité. À leur arrivée, les policiers auraient repéré un véhicule au volant duquel se trouvait vraisemblablement l'homme qui les avait alertés. Sans crier gare, ce dernier aurait alors foncé à plusieurs reprises en direction des policiers, qui ont répliqué en ouvrant le feu.

«Réflexion» sur les enquêtes indépendantes

Le ministère de la Sécurité publique (MSP) exige une enquête indépendante lorsqu'une personne meurt ou subit des blessures graves au cours d'une opération policière ou pendant qu'elle est en détention. Par souci de transparence, l'enquête est alors confiée à un autre corps policier.

Le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, a confirmé hier qu'une «réflexion» était en cours pour réévaluer les mécanismes qui autorisent les policiers à enquêter sur les gestes de collègues d'autres corps.

Mais selon M. Dutil, les problèmes relèvent avant tout «de la perception». La population présume que les policiers vont nécessairement prendre parti pour leurs collègues. Des sources policières soulignent que Québec n'a pas l'intention de s'inspirer des mécanismes mis en place en Ontario, où une commission totalement indépendante, formée d'anciens policiers, fait enquête sur les bavures policières. Une telle structure s'est avérée coûteuse, explique-t-on.

Entre 1999 et 2010, le ministère de la Sécurité publique a commandé 318 enquêtes indépendantes, dont 72 sur des opérations policières au cours desquelles des personnes ont été tuées ou gravement blessées. De ces 318 enquêtes, 3 ont mené à des accusations contre des policiers, 285 n'ont entraîné aucune mise en accusation et 30 sont toujours en cours.

Avec Denis Lessard





Photo: Patrick Sanfaçon, Archives La Presse

Le 26 janvier, une policière a abattu un homme dans le quartier Rosemont.